Rectocolite hémorragique

ParAaron E. Walfish, MD, Mount Sinai Medical Center;
Rafael Antonio Ching Companioni, MD, HCA Florida Gulf Coast Hospital
Vérifié/Révisé nov. 2023
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La rectocolite ulcéro-hémorragique est une maladie inflammatoire et ulcérative chronique, localisée à la muqueuse colique, caractérisée le plus souvent par une diarrhée hémorragique. Une symptomatologie extra-intestinale, notamment une arthrite, peut survenir. Le risque à long terme de cancer du côlon est élevé par rapport aux personnes non affectées. Le diagnostic repose sur la coloscopie. Le traitement repose sur l'acide 5-aminosalicylique, les corticostéroïdes, les immunomodulateur, les produits biologiques, certains antibiotiques et parfois la chirurgie.

(Voir aussi Revue générale des maladies intestinales inflammatoires chroniques.)

Physiopathologie de la rectocolite hémorragique

La rectocolite ulcéro-hémorragique débute habituellement dans le rectum. Elle peut rester localisée au rectum (rectite ulcéreuse) ou s'étendre en amont, en touchant parfois la totalité du côlon. Rarement, elle concerne la majeure partie du côlon d'emblée.

L'inflammation dans la rectocolite ulcéro-hémorragique touche la muqueuse et la sous-muqueuse et il existe une limite nette entre tissus normal et pathologique. La musculeuse est atteinte uniquement lors d'une atteinte sévère. Aux stades précoces, la muqueuse est érythémateuse, finement granitée et friable, avec disparition du réseau vasculaire normal et elle est souvent parsemée de taches hémorragiques. De larges ulcérations muqueuses avec un exsudat purulent abondant caractérisent une atteinte sévère. Des îlots de muqueuse relativement normale ou inflammatoire et hyperplasique (pseudo-polypes) font saillie au-dessus des zones de muqueuse ulcérée. Il n'existe pas de fistules ou d'abcès.

Rectocolite hémorragique
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Les signes coloscopiques de la rectocolite ulcéro-hémorragique montrés ici comprennent un œdème, une perte de la vascularisation, une muqueuse friable et des ulcères.
Photo courtoisie des Drs. Aaron E. Walfish et Rafael A. Ching Companioni.
Pseudopolypes
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Les pseudo-polypes sont des zones de muqueuse hyperplasique enflammée qui dépassent de la surface de la muqueuse.
Photo courtoisie des Drs. Aaron E. Walfish et Rafael A. Ching Companioni.

Colite toxique

On parle de colite fulminante ou colite toxique lorsque l'extension des ulcérations entraîne un iléus localisé et une péritonite. En quelques jours ou quelques heures, le côlon perd de son tonus musculaire et commence à se dilater.

Les termes de mégacôlon toxique et de dilatation toxique sont inappropriés parce que l'état inflammatoire et toxique et ses complications peuvent survenir sans mégacôlon franc (celui-ci étant défini par un diamètre > 6 cm au niveau du côlon transverse pendant une poussée).

Cette complication est une urgence médicale qui apparaît habituellement spontanément au cours de l'évolution d'une colite particulièrement grave, mais elle peut être favorisée par l'utilisation inadéquate de médicaments antidiarrhéiques opiacés ou anticholinergiques. Une perforation colique peut survenir et augmenter significativement la mortalité.

Symptomatologie de la rectocolite hémorragique

Généralement, les patients ont

  • Des épisodes de diarrhée hémorragique, variables en intensité et en durée, sont séparés par des périodes asymptomatiques

Le plus souvent, la crise débute de façon insidieuse avec des besoins défécatoires de plus en plus impérieux, des coliques abdominales modérées et la présence de sang et de mucus dans les selles. Certains cas surviennent après une infection (p. ex., amibiase, dysenterie bacillaire).

Lorsque la rectocolite ulcéro-hémorragique est limitée à la région rectosigmoïdienne, les selles peuvent être normales ou dures et sèches, mais des émissions rectales de mucus contenant des globules blancs et des globules rouges accompagnent ou se produisent entre les selles. Les symptômes généraux sont modérés ou absents.

Si l'ulcération s'étend de façon proximale, les selles sont plus liquides, et le patient peut avoir > 10 selles/jour, fréquemment accompagnées de coliques importantes et d'un ténesme rectal pénible, sans répit même pendant la nuit. Les selles peuvent être aqueuses, ou contenir du mucus et sont souvent constituées presque exclusivement de sang et de pus.

La colite fulminante ou toxique se manifeste initialement avec une diarrhée soudaine profuse, une fièvre à 40° C, des douleurs abdominales, des signes de péritonite (p. ex., une douleur à la décompression) et des signes de toxémie profonde.

La symptomatologie générale, plus fréquente dans la rectocolite ulcéro-hémorragique grave, comprend une asthénie, une fièvre, une anémie, une anorexie et une perte de poids. Les manifestations extra-intestinales des maladies intestinales inflammatoires (en particulier les complications articulaires et cutanées) sont plus fréquentes lorsque les symptômes généraux sont présents.

Diagnostic de la rectocolite ulcéro-hémorragique

  • Coproculture et examen des selles au microscope (pour éliminer les causes infectieuses)

  • Sigmoïdoscopie avec biopsies

Présentation initiale

Le diagnostic de rectocolite ulcéro-hémorragique est évoqué en cas de symptomatologie typique, en particulier lorsqu'elle est accompagnée de manifestations extra-intestinales ou qu'il existe des antécédents de poussées similaires. La rectocolite ulcéro-hémorragique doit être distinguée de la maladie de Crohn (voir tableau Diagnostic différentiel de la maladie de Crohn et de la rectocolite ulcéro-hémorragique) mais, plus important, des autres causes de colite aiguë (p. ex., infectieuses; et chez le patient âgé, ischémiques).

Chez tous les patients, des coprocultures à la recherche d'entéropathogènes doivent être effectuées et Entamoeba histolytica doit également être exclue par l'examen de prélèvements de selles fraîches. Quand on suspecte une amibiase pour des raisons épidémiologiques ou de voyage en zone endémique, il faut faire une sérologie et des biopsies. Les antécédents de prise d'antibiotiques ou d'hospitalisation récente doivent faire rechercher la toxine de Clostridioides difficile (précédemment Clostridium difficile) dans les selles. Les patients à risque doivent être testés pour rechercher le VIH, la gonococcie, l'herpesvirus, les Chlamydiae et l'amibiase. Les infections opportunistes (p. ex., cytomégalovirus, Mycobacterium avium-intracellulare) ou le sarcome de Kaposi doivent également être évoqués chez le patient immunodéprimé. Chez la femme qui prend des contraceptifs oraux, une colite induite par les contraceptifs est possible; elle se résout généralement spontanément après arrêt du traitement hormonal. L'analyse des selles de la lactoferrine et de la calprotectine fécale peut être utile pour différencier la maladie intestinale inflammatoire de la diarrhée fonctionnelle.

Une sigmoïdoscopie doit être effectuée; elle permet la confirmation visuelle de la colite et de faire des prélèvements directs pour la culture et l'examen anatomopathologique, tant au niveau des zones saines que pathologiques. Bien que l'inspection visuelle et les biopsies puissent ne pas permettre un diagnostic de certitude, en raison des chevauchements des aspects endoscopiques avec d'autres types de colites aiguës, d'évolution spontanément favorable d'origine infectieuse, une colite infectieuse peut habituellement être distinguée histologiquement d'une colite chronique idiopathique en rapport avec une rectocolite ulcéro-hémorragique ou une maladie de Crohn. Des lésions péri-anales sévères, le respect du rectum, l'absence de saignement et l'atteinte asymétrique ou segmentaire du côlon sont en faveur d'une maladie de Crohn plutôt que d'une rectocolite ulcéro-hémorragique. La coloscopie est habituellement inutile initialement mais doit être pratiquée en dehors du contexte de l'urgence si l'inflammation a une extension plus proximale que le niveau atteint par le sigmoïdoscope.

Des examens biologiques doivent être effectués pour dépister une anémie, une hypoalbuminémie et des troubles hydro-électrolytiques. Un bilan hépatique doit être pratiqué; une élévation des phosphatases alcalines et du taux de gamma-glutamyl transpeptidase suggèrent la possibilité d'une cholangite sclérosante primitive. Les anticorps anticytoplasme de neutrophiles sont relativement spécifiques (60 à 70%) de la rectocolite ulcéro-hémorragique. Les anticorps anti–Saccharomyces cerevisiae sont relativement spécifiques de la maladie de Crohn. Cependant, ces examens ne permettent pas de différencier de façon fiable les 2 maladies et ne sont pas recommandés pour un diagnostic de routine. D'autres anomalies de laboratoire sont possibles comme une hyperleucocytose, une thrombocytose et des marqueurs inflammatoires de phase aiguë élevés (p. ex., VS, protéine C réactive).

Les rx n'ont pas de valeur diagnostique mais montrent parfois des anomalies. Les rx d'abdomen sans préparation peuvent montrer un œdème muqueux, une disparition des haustrations et l'absence de selles moulées dans les segments intestinaux atteints; cependant, le rendement est faible et elles ne sont pas recommandées systématiquement. Le lavement baryté montre des modifications similaires de façon plus claire et peut également montrer des ulcérations, mais le lavement ne doit pas être fait en cas de tableau clinique aigu. Un côlon rigide et raccourci avec une muqueuse atrophique ou pseudo-polypoïde est souvent vu après une évolution de plusieurs années. La mise en évidence d'aspects rx en empreintes de pouce et des lésions segmentaires sont plus évocatrices d'ischémie intestinale ou, éventuellement, de colite de Crohn, que de rectocolite ulcéro-hémorragique.

Symptômes récidivants

Les patients qui ont une rectocolite ulcéro-hémorragique connue avec récidive de symptômes typiques doivent être examinés cliniquement, mais les examens complémentaires ne sont pas toujours nécessaires. En fonction de la durée et la gravité des symptômes, une sigmoïdoscopie ou une coloscopie ainsi qu'une NFS peuvent être effectuées. Une coproculture et la recherche de parasites dans les selles ainsi que la recherche de la toxine de C. difficile doivent être pratiquées en cas de symptômes atypiques lors de la rechute ou en cas d'aggravation survenant après une rémission prolongée, pendant une épidémie, après un traitement antibiotique ou si le médecin a un doute diagnostique.

Crises sévères aiguës

Une hospitalisation rapide est nécessaire en cas de poussées sévères. Les rx d'abdomen sans préparation en position couché et debout doivent être effectuées; elles peuvent montrer un mégacôlon ou une accumulation de gaz au niveau d'un long segment colique continu paralysé, en raison d'une perte du tonus musculaire. Les lavements barytés doivent être évités du fait du risque de perforation, mais une sigmoïdoscopie minutieuse est typiquement recommandée afin de vérifier la gravité et exclure l'infection. NFS, numération plaquettaire, VS, protéine C-réactive, électrolytes, et albumine doivent être effectués; temps partiel de thromboplastine (= TPP, TCK, TCA, TPP), TCA, et le groupage sanguin et compatibilité croisée sont également indiqués en cas d'hémorragie sévère.

Le patient doit être étroitement surveillé à la recherche d'une péritonite ou d'une perforation. La percussion hépatique est importante car la disparition de la matité caractéristique peut être le premier signe d'une perforation en péritoine libre, en particulier chez le patient dont les signes de souffrance péritonéale peuvent être masqués par des posologies massives de corticostéroïdes. Des rx de l'abdomen sont pratiquées toutes les 1 ou 2 jours afin de suivre l'évolution de la distension colique et de dépister un pneumopéritoine ou un liseré d'air intramural; une TDM est plus sensible pour détecter l'air extraluminal ou l'abcès péricolique.

Pièges à éviter

  • Éviter les lavements barytés lors des exacerbations sévères de la rectocolite ulcéro-hémorragique en raison du risque de perforation.

Traitement de la rectocolite hémorragique

  • Prise en charge diététique et lopéramide (sauf dans les attaques aiguës graves) pour soulager les symptômes

  • Acide 5-aminosalicylique (5-ASA)

  • Corticostéroïdes et autres médicaments en fonction des symptômes et de la sévérité

  • Des antimétabolites, des agents biologiques, un inhibiteur de la Janus kinase ou un modulateur du récepteur de la sphingosine 1-phosphate (S1P)

  • Parfois, intervention chirurgicale

Les détails du choix et de la posologie des médicaments sont décrits dans Médicaments des maladies inflammatoires intestinales. (Voir aussi the American College of Gastroenterology's 2019 guidelines for management of ulcerative colitis in adults.)

Mesures de prise en charge générale

La suppression dans l'alimentation des fruits et légumes crus évite les traumatismes de la muqueuse colique inflammée et peut amener une amélioration symptomatique. Un régime alimentaire sans lait permet d'obtenir une amélioration, mais ne doit pas être maintenu si aucune amélioration n'est constatée. Le lopéramide 2 mg par voie orale 2 à 4 fois/jour est indiqué en cas de diarrhée relativement légère; des posologies orales plus importantes (4 mg le matin et 2 mg après chaque défécation) peuvent être nécessaires en cas de diarrhée plus importante. Les médicaments antidiarrhéiques doivent être utilisés avec une extrême prudence dans les cas plus sévères, car ils peuvent favoriser la survenue d'un mégacôlon toxique. On doit conseiller à tous les patients atteints de maladie intestinale inflammatoire de prendre des quantités appropriées de calcium et de vitamine D.

Les mesures de médecine préventive de routine (p. ex., vaccinations, dépistage du cancer) doivent être considérées comme importantes.

Maladie modérée du côté gauche

Les patients qui ont une proctite ulcéreuse ou une proctosigmoïdite légère ou modérée qui ne s'étend pas proximalement au-delà du côlon sigmoïde sont traités par 5-ASA (mésalamine) par lavement 1 ou 2 fois/jour selon la gravité. Les suppositoires sont efficaces dans les maladies plus distales et sont habituellement préférés par les patients. Les lavements de corticostéroïdes et au budésonide sont un peu moins efficaces, mais doivent être utilisés si le 5‑ASA est inefficace ou n'est pas toléré. Quand la rémission est obtenue, la posologie est lentement réduite à des posologies d'entretien. Les médicaments 5-ASA oraux ont théoriquement un intérêt pour diminuer la probabilité d'extension proximale de la maladie.

Maladie modérée ou étendue

Les patients présentant une inflammation proximale du côlon sigmoïde ou une maladie du côté gauche qui ne répond pas aux agents topiques doivent recevoir un agent biologique (infliximab, adalimumab, golimumab, ustekinumab, vedolizumab) avec ou sans médicament immunomodulateur (azathioprine ou 6-mercaptopurine). Parfois, des corticostéroïdes à haute dose sont ajoutés pour induire une rémission en cas de rectocolite hémorragique modérée à sévère. L'association d'un immunomodulateur et d'un traitement anti-TNF est parfois utile. Enfin, chez certains patients, un essai de l'inhibiteur de la Janus kinase (tofacitinib ou upadacitinib), ou un essai de l'ozanimod, un modulateur du récepteur de la sphingosine 1-phosphate.

Maladie grave

Les patients qui ont > 10 défécations hémorragiques par jour, une tachycardie, une fièvre élevée ou des douleurs abdominales importantes doivent être hospitalisés pour recevoir un agent biologique et/ou une corticothérapie à forte dose IV. Un apport hydroélectrolytique IV est administré et des transfusions sanguines sont administrées en cas de déshydratation et d'anémie. Le patient doit être suivi attentivement à la recherche du développement d'une colite toxique. L'hyperalimentation parentérale est parfois utilisée comme support nutritionnel, mais n'a pas d'intérêt en tant que traitement principal; les patients qui peuvent absorber de la nourriture doivent manger.

Chez les patients qui ne répondent pas aux agents biologiques et/ou aux corticostéroïdes dans les 3 à 7 jours on doit envisager la cyclosporine IV ou la chirurgie. Le patient répondeur aux corticostéroïdes est traité après une semaine environ par prednisone 40 mg par voie orale 1 fois/jour, posologie réduite progressivement à domicile en fonction de la réponse clinique. Les patients qui ont reçu la cyclosporine IV et qui ont répondu au traitement sont traités ensuite par cyclosporine par voie orale et azathioprine ou 6-mercaptopurine. La cyclosporine par voie orale est poursuivi pendant environ 3 à 4 mois, période pendant laquelle la corticothérapie est progressivement arrêtée et que la cyclosporinémie est régulièrement contrôlée. Certains recommandent une prévention contre Pneumocystis jirovecii pendant la période de traitement concomitant par corticostéroïdes, cyclosporine et antimétabolite. Le tacrolimus, un immunodépresseur utilisé également chez les patients transplantés, semble tout aussi efficace que la cyclosporine et peut être envisagé en cas de rectocolite ulcéro-hémorragique sévère ou réfractaire qui ne nécessite pas d'hospitalisation. Les taux sanguins résiduels doivent être maintenus entre 10 et 15 ng/mL (12 à 25 nmol/L).

Colite fulminante

En cas de suspicion de colite fulminante ou toxique, le patient doit

  1. Arrêter tous les médicaments antidiarrhéiques

  2. Ne rien prendre par la bouche et poser un long tube intestinal mis en aspiration intermittente

  3. Reçoivent une réanimation agressive par liquides et électrolytes IV avec du NaCl à 0,9%, et du chlorure de potassium et du sang au besoin

  4. Reçoit de fortes doses de corticostéroïdes ou de cyclosporine IV

  5. Recevoir des antibiotiques (p. ex., 500 mg de métronidazole IV toutes les 8 heures et de la ciprofloxacine 500 mg IV toutes les 12 heures)

  6. Peut-être recevoir de l'infliximab

Faire passer le patient dans son lit toutes les 2 ou 3 heures du décubitus au décubitus ventral permet de redistribuer les gaz coliques et d'éviter la distension progressive du colon. L'insertion d'une sonde rectale souple peut également être utile, mais il faut procéder avec précaution afin de ne pas perforer l'intestin. Même si la décompression d'un côlon dilaté est obtenue, le patient n'est pas hors de danger à moins que le processus inflammatoire sous-jacent soit contrôlé; autrement, une colectomie restera nécessaire.

Si les mesures médicales intensives n'entraînent pas d'amélioration nette dans les 24 à 48 heures, le recours immédiat à la chirurgie s'impose, sous peine de voir le patient décéder d'un sepsis causé par la translocation bactérienne ou d'une perforation colique.

Traitement d'entretien

Après traitement efficace d'une poussée, les corticostéroïdes sont réduits en fonction de la réponse clinique et doivent être arrêtés car ils sont inefficaces en traitement d'entretien. Suivant la localisation de la maladie, le patient doit rester sous 5‑ASA par voie orale ou rectale de façon définitive car l'arrêt du traitement d'entretien entraîne souvent une rechute. Les intervalles de mise en place des préparations rectales peuvent être progressivement allongés à 1 jour/2 ou 1 jour/3. Il est amplement démontré que l'association de la thérapie orale et rectale est significativement plus efficace que chacune des thérapies prise isolément.

Les patients qui ne peuvent pas être sevrés des corticostéroïdes doivent recevoir des thiopurines (azathioprine ou 6-mercaptopurine), du méthotrexate, des biologiques, des inhibiteurs de la Janus kinase, de l'ozanimod, un modulateur du récepteur de la sphingosine 1-phosphate, ou une association de ces médicaments.

Les patients qui ont commencé à prendre de l'infliximab pour le traitement d'induction doivent continuer ce médicament en entretien, également

Chirurgie

Il est nécessaire, dans près d'1/3 des cas de rectocolite ulcéro-hémorragique étendue, de recourir finalement à la chirurgie. La proctocolectomie totale assure la guérison: l'espérance de vie revient à la normale et le risque de cancer du côlon est diminué de façon importante. Cependant, certaines études rapportent que jusqu'à 25% des patients développent par la suite une inflammation de la muqueuse de l'intestin grêle compatible avec la maladie de Crohn (1, 2); cela peut se produire de nombreuses années après la chirurgie. Après une coloproctectomie totale avec anastomose de poche iléale-anale, il subsiste un petit risque de dysplasie ou de cancer dans la zone rectale de transition anale et même dans la poche iléale. Après une coloproctectomie totale avec anastomose iléo-anale, la qualité de vie est améliorée; cependant, de nouveaux défis au niveau de la qualité de vie apparaissent.

La colectomie d'urgence est indiquée en cas d'hémorragie massive, de colite toxique fulminante ou de perforation. La colectomie subtotale avec iléostomie et stomie rectosigmoïdienne ou fistule muqueuse (procédure de Hartmann) est habituellement la méthode de choix, car la plupart des patients en phase critique ne peuvent supporter une chirurgie plus lourde. Le moignon rectosigmoïdien peut être enlevé ultérieurement ou être utilisé pour une anastomose iléo-anale avec poche iléale. Le moignon rectal intact ne doit pas rester indéfiniment en place du fait du risque de poussée ou de transformation maligne.

Une intervention chirurgicale programmée est indiquée en cas de cancer, de sténose symptomatique, de retard de croissance chez l'enfant ou le plus souvent, en cas de pathologie chronique incurable entraînant une infirmité ou une dépendance aux corticostéroïdes. Les manifestations extra-intestinales sévères (p. ex., pyoderma gangrenosum), sont actuellement mieux contrôlées par les traitements médicaux intensifs, et ne sont plus que rarement des indications chirurgicales.

La procédure de choix en dehors du contexte de l'urgence si la fonction sphinctérienne est normale est la proctocolectomie avec anastomose iléo-anale avec réservoir iléal. Cette intervention crée un réservoir pelvien ou poche à partir de l'iléon distal, qui est anastomosé à l'anus. Le sphincter intact permet une continence, avec généralement 4 à 9 selles/jour (notamment 1 ou 2 la nuit).

La pochite est une réaction inflammatoire qui se produit après coloproctectomie totale avec anastomose iléo-anale chez près de 50% des patients. Le risque de pochite semble plus élevé chez les patients atteints de cholangite sclérosante primitive, chez les patients présentant des manifestations extra-intestinales pré-opératoires et peut-être chez les patients présentant une sérologie pré-opératoire élevée d'anticorps anti-neutrophiliques périnucléaires et d'autres biomarqueurs de maladies inflammatoires de l'intestin. La pochite est supposée être en relation avec une pullulation bactérienne et elle est traitée par antibiotiques (p. ex., quinolones). Les probiotiques peuvent être protecteurs. La plupart des cas de pochites sont facilement contrôlés, mais 5 à 10% peuvent se montrer réfractaires à tout traitement médical Iléostomie selon Brooke. Chez une minorité de patients plus âgés, bien insérés familialement et socialement, ayant un tonus sphinctérien faible et ne tolérant pas des selles fréquentes ou simplement incapables ou peu disposés à faire face aux conséquences d'une pochite fréquente ou chronique, l'iléostomie de Brooke reste la procédure de choix.

L'iléite après coloproctectomie totale avec anastomose iléo-anale ou iléostomie terminale est traitée comme les autres formes de maladies intestinales inflammatoires. Les procédures chirurgicales sont rarement nécessaires.

Dans tous les cas, les problèmes physiques et affectifs résultant de toute forme d'exérèse colique doivent être identifiés et il faut s'assurer que le patient reçoit tous les conseils pratiques et le soutien médical et psychologique dont il a besoin avant et après l'intervention.

Références pour le traitement

  1. 1. Hercun J, Côté-Daigneault J, Lahaie RG, et al: Crohn's disease after proctocolectomy and IPAA for ulcerative colitis. Dis Colon Rectum 64(2):217–224, 2021. doi: 10.1097/DCR.0000000000001721

  2. 2. Shamah S, Schneider J, Korelitz BI: High incidence of recurrent Crohn's disease following colectomy for ulcerative colitis revealed with long follow-up. Dig Dis Sci 63(2):446–451, 2018. doi: 10.1007/s10620-017-4873-7

Pronostic de la rectocolite hémorragique

Habituellement, la rectocolite ulcéro-hémorragique est une affection chronique dont l'évolution est émaillée de poussées et de rémissions. Chez certains patients, la poussée initiale devient fulminante avec risque d'hémorragie massive, de perforation ou de sepsis et de toxémie. Une guérison complète après une poussée unique est possible chez quelques patients.

Les patients présentant une rectite hémorragique isolée ont un meilleur pronostic. Les manifestations systémiques graves, les complications toxiques ou la dégénérescence néoplasique sont rares et une extension ultérieure de la maladie ne se produit que dans un petit groupe de patients. Le recours à la chirurgie est rarement nécessaire et l'espérance de vie est normale. Cependant, les symptômes peuvent se montrer rebelles et réfractaires. En outre, parce que la rectocolite ulcéro-hémorragique peut débuter au niveau du rectum et s'étendre ensuite en amont, la rectite ne doit pas être considérée comme limitée qu'après 6 mois d'évolution. Une maladie localisée qui s'étend ultérieurement est souvent plus sévère et plus résistante au traitement.

Cancer du côlon

Le risque de cancer du côlon est proportionnel à la durée de la maladie et à la longueur de côlon atteint, mais pas nécessairement à l'activité de la maladie. Certaines études suggèrent que l'inflammation microscopique persistante est un facteur de risque, et que l'utilisation de acide 5-aminosalicylique (5-ASA) pour contrôler l'inflammation joue un rôle protecteur.

Le risque élevé de cancer du côlon conféré par les maladies intestinales inflammatoires a été observé dans de nombreuses études. Des données plus récentes suggèrent que la prévalence du cancer du côlon est en baisse et a été surestimée par les recherches dans les centres de soins spécialisés (1).

Les patients qui ont une maladie intestinale inflammatoire et une cholangite sclérosante primitive présentent un risque majoré de cancer dès le diagnostic de la colite.

La surveillance endoscopique régulière, de préférence pendant les périodes de rémission, est préconisée chez les patients atteints de la maladie depuis > 8 à 10 ans (sauf en ce qui concerne la rectite isolée) ou en cas de cholangite sclérosante primitive et dans ce cas une coloscopie de surveillance doit être faite dès le diagnostic. Les lignes directrices (2) suggèrent d'effectuer des biopsies aléatoires (prises tous les 10 cm sur toute la longueur du côlon) en coloscopie en lumière blanche à haute définition et de ne faire des biopsies ciblées des lésions visibles qu'en chromoendoscopie pour détecter les dysplasies. La dysplasie de tout grade dans une zone affectée par la colite est susceptible d'évoluer vers une néoplasie plus avancée et même un cancer. Après élimination complète du polypoïde résécable par endoscopie ou des lésions dysplasiques non polypoïdes, la surveillance par coloscopie est suggérée plutôt que la colectomie. Les patients présentant une dysplasie non visible à l'endoscopie doivent probablement être adressés à un gastro-entérologue expert en matière de surveillance des maladies inflammatoires en utilisant la chromoendoscopie et/ou la coloscopie à haute définition pour décider si une colectomie ou une surveillance continue de la coloscopie doivent être effectuées.

La fréquence optimale des coloscopies de surveillance n'a pas été établie, mais certains experts la recommandent tous les 2 ans au cours de la 2e décennie de la maladie et tous les ans par la suite.

La survie à long terme est de près de 50% dans les cas de cancer sur colite, un chiffre comparable à celui observé dans le cancer colorectal dans la population générale.

Références pour le pronostic

  1. 1. Stidham RW, Higgins PDR: Colorectal cancer in inflammatory bowel disease. Clin Colon Rectal Surg 31(3):168-178, 2018. doi: 10.1055/s-0037-1602237

  2. 2. Laine L, Kaltenbach T, Barkun A, et al: SCENIC international consensus statement on surveillance and management of dysplasia in inflammatory bowel disease. Gastroenterology 148(3):639-651.e28, 2015. doi: 10.1053/j.gastro.2015.01.031

Points clés

  • La rectocolite ulcéro-hémorragique commence dans le rectum et peut s'étendre proximalement de façon contiguë sans zones de normalité intestinale.

  • Les symptômes sont des épisodes intermittents de crampes abdominales et de diarrhée sanglante.

  • Les complications comprennent la colite fulminante, qui peut mener à la perforation; à long terme, le risque de cancer du côlon est augmenté.

  • Traiter une maladie légère par 5-ASA rectal et, la maladie proximale, par la voie orale.

  • Traiter la maladie étendue par des corticostéroïdes à haute dose, un traitement immunomodulateur (p. ex., azathioprine, 6-mercaptopurine), des produits biologiques (p. ex., adalimumab, infliximab, vedolizumab), tofacitinib, upadacitinib ou ozanimod.

  • Traiter la maladie fulminante par de hautes doses de corticostéroïdes IV ou de la ciclosporine et des antibiotiques (p. ex., métronidazole, ciprofloxacine) ou infliximab; une colectomie peut être nécessaire.

  • Il est nécessaire, dans près d'1/3 des cas de rectocolite ulcéro-hémorragique étendue, de recourir finalement à la chirurgie.

Plus d'information

La source d'information suivante en anglais peut être utile. S'il vous plaît, notez que LE MANUEL n'est pas responsable du contenu de cette ressource.

  1. American College of Gastroenterology: Guidelines for the management of ulcerative colitis in adults (2019)

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