Gastrinome

(Syndrome de Zollinger-Ellison)

ParB. Mark Evers, MD, Markey Cancer Center, University of Kentucky
Vérifié/Révisé mai 2024
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Un gastrinome est une tumeur qui sécrète de la gastrine, généralement localisée dans le pancréas ou dans la paroi duodénale. Cela induit une hypersécrétion d'acide gastrique et des ulcères gastroduodénaux agressifs et réfractaires (syndrome de Zollinger-Ellison). Le diagnostic repose sur le dosage de la concentration sérique de la gastrine. Le traitement consiste en l'administration d'inhibiteurs de la pompe à protons à fortes doses et l'exérèse chirurgicale de la tumeur.

Les gastrinomes sont un type de tumeur endocrine du pancréas qui provient des cellules des îlots pancréatiques, mais peut également provenir des cellules de production de la gastrine situées dans le duodénum et d'autres sites. La grande majorité (80%) des gastrinomes se forme dans le pancréas ou la paroi duodénale et le duodénum est le site le plus fréquent (1). Les autres peuvent être localisés dans le hile splénique, le mésentère, l'estomac, les ganglions lymphatiques ou les ovaires. Environ 50% des patients ont des tumeurs multiples.

Les gastrinomes sont des tumeurs habituellement de petite taille (< 1 cm de diamètre) et à développement lent. Environ 50% sont malins.

Environ 40 à 60% des patients qui ont un gastrinome ont une néoplasie endocrinienne multiple, un syndrome associé aux tumeurs neuroendocrines du pancréas (p. ex., gastrinome), aux adénomes hypophysaires et à une hyperplasie parathyroïdienne.

Référence générale

  1. 1. Krampitz GW, Norton JA. Pancreatic neuroendocrine tumors. Curr Probl Surg 2013;50(11):509-545. doi:10.1067/j.cpsurg.2013.08.001

Symptomatologie du gastrinome

Le syndrome de Zollinger-Ellison se présente habituellement sous la forme d'un ulcère gastroduodénal massif, avec des ulcères survenant dans des topographies inhabituelles (jusqu'à 25% sont localisés à distance du bulbe duodénal). Cependant, jusqu'à 25% des patients ne présentent pas d'ulcère au diagnostic (1). On peut observer les symptômes caractéristiques d'un ulcère et/ou de ses complications (p. ex., perforation, hémorragie, obstruction). La diarrhée est le symptôme initial chez 25 à 40% des malades.

Référence pour la symptomatologie

  1. 1. Krampitz GW, Norton JA. Pancreatic neuroendocrine tumors. Curr Probl Surg 2013;50(11):509-545. doi:10.1067/j.cpsurg.2013.08.001

Diagnostic du gastrinome

  • Taux de gastrine sérique

  • TDM, scintigraphie ou tomographie par émission de positrons (PET) pour localiser

Un gastrinome est suspecté devant l'anamnèse, en particulier lorsque les symptômes sont réfractaires au traitement antiacide standard.

Le taux de gastrine sérique est le test le plus fiable. Tous les patients ont des taux > 150 pg/mL (> 72 pmol/L); des taux nettement élevés > 1000 pg/mL (> 480 pmol/L) chez un patient présentant des signes cliniques compatibles et une hypersécrétion d'acide gastrique > 15 mEq/h permettent de poser le diagnostic. Cependant, une hypergastrinémie modérée peut survenir dans d'autres situations d'hypochlorhydrie (p. ex., anémie pernicieuse, gastrite chronique, utilisation d'inhibiteurs de la pompe à protons), dans l'insuffisance rénale associée à une clairance diminuée de la gastrine, après une résection intestinale étendue et dans le phéochromocytome.

Un test de stimulation à la sécrétine peut être utile en cas de taux de gastrine  < 1000 pg/mL (< 480 pmol/L). Un bolus IV de sécrétine 2 mcg/kg est administré avec des mesures itératives de la gastrine sérique (10 et 1 min avant l'injection et 2, 5, 10, 15, 20 et 30 min après l'injection). Habituellement, en cas de gastrinome, on retrouve une augmentation paradoxale des taux de gastrine, à l'inverse de ce que l'on observe chez le patient qui a une hyperplasie des cellules antrales G ou un ulcère gastroduodénal classique. Il faut également rechercher une infection par Helicobacter pylori chez ces patients, car il induit souvent un ulcère gastroduodénal et un excès modéré de sécrétion de gastrine.

Une fois le diagnostic de gastrinome établi, la ou les tumeurs doivent être localisées. Le premier examen à réaliser est la TDM abdominale ou la scintigraphie aux récepteurs de la somatostatine (octreoscan), qui permettent d'identifier la tumeur primitive et une éventuelle dissémination. La PET ou l'artériographie sélective avec grossissement et soustraction est également utile. Si aucun signe de métastases n'est présent et que la localisation de la tumeur primitive est incertaine, une échographie endoscopique doit être effectuée. Une alternative peut être l'injection artérielle sélective de sécrétine.

Traitement du gastrinome

  • Suppression de l'acidité

  • Résection chirurgicale en cas de maladie localisée

  • Chimiothérapie en cas de maladie métastatique

Suppression de l'acidité

Les inhibiteurs de la pompe à protons sont les médicaments de choix (p. ex., oméprazole ou esoméprazole 40 mg par voie orale 2 fois/jour). La posologie peut être diminuée progressivement dès la disparition des symptômes et la diminution du débit d'acide. Une dose d'entretien est nécessaire; les patients doivent continuer à prendre ces médicaments à moins qu'ils ne soient opérés.

Les injections d'octréotide, 100 à 500 mcg en sous-cutané 2 à 3 fois/jour, peuvent également diminuer la sécrétion d'acide gastrique et être utilisées comme traitement palliatif chez le patient qui ne répond pas bien aux inhibiteurs de la pompe à protons. Une forme d'octréotide à longue durée d'action peut être utilisée (20 à 30 mg IM 1 fois/mois).

Chirurgie

L'exérèse chirurgicale doit être tentée chez le patient sans localisation secondaire évidente du fait du risque élevé de cancer sous-jacent. En peropératoire, la duodénotomie associée à la transillumination endoscopique ou à l'échographie est utile pour localiser les tumeurs.

La guérison chirurgicale est possible chez 20 à 25% des patients si le gastrinome est localisé et ne fait pas partie d'un syndrome de néoplasie endocrinienne multiple (1).

Chimiothérapie

En cas de maladie métastatique, une association de streptozocine avec du 5-fluorouracile ou de la doxorubicine constitue la chimiothérapie de choix des tumeurs des cellules des îlots de Langerhans. L'association peut réduire la masse tumorale (dans 50 à 60% des cas) et les taux de gastrine sérique et est utile comme traitement associé à l'oméprazole.

Les chimiothérapies à l'étude pour les TNE (tumeurs neuroendocrines) comprennent les protocoles à base de témozolomide, l'évérolimus et le sunitinib. Des résultats encourageants de l'essai CABINET montrent que le cabozantinib améliore la survie sans progression chez les patients qui ont des TNE (tumeurs neuroendocrines) avancées (2).

Références pour le traitement

  1. 1. Deveney CW, Deveney KE, Stark D, Moss A, Stein S, Way LW. Resection of gastrinomas. Ann Surg 198(4):546–553, 1983. doi:10.1097/00000658-198310000-00015

  2. 2. Chan J, Geyer S, Ou F-S, et al. LBA53 Alliance A021602: Phase III, double-blinded study of cabozantinib versus placebo for advanced neuroendocrine tumors (NET) after progression on prior therapy (CABINET). Ann Oncol 34 (Suppl 2): S1292, 2023.

Pronostic du gastrinome

Le taux de survie à 10 ans est > 90% après une résection chirurgicale complète de la tumeur isolée, versus 43% à 5 ans et 25% à 10 ans respectivement après une résection incomplète (1).

Référence pour le pronostic

  1. 1. Krampitz GW, Norton JA. Pancreatic neuroendocrine tumors. Curr Probl Surg 2013;50(11):509-545. doi:10.1067/j.cpsurg.2013.08.001

Points clés

  • La plupart des gastrinomes se manifeste par des symptômes d'ulcère gastro-duodénal, mais certains patients ont une diarrhée lors de la présentation.

  • Environ la moitié des patients a des gastrinomes multiples et environ la moitié a un syndrome de néoplasie endocrinienne multiple; la moitié des gastrinomes sont malins.

  • Les taux de gastrine sérique sont généralement diagnostiques, mais en cas de taux élevés limites un test de provocation par la sécrétine peut être nécessaire.

  • Les tumeurs peuvent souvent être localisées par la TDM, la scintigraphie des récepteurs somatostatine, ou la tomographie par émission de positrons (PET).

  • La sécrétion acide est supprimée par un inhibiteur de la pompe à protons et parfois aussi par l'octréotide, en attendant l'ablation chirurgicale.

  • De nouveaux protocoles de chimiothérapie peuvent être utiles en cas de maladie métastatique avancée.

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