Les douleurs coccygiennes ont de nombreuses causes. Nombre de ces causes sont des troubles des structures anatomiques situées à proximité du coccyx plutôt qu'au niveau du coccyx lui-même.
L'incidence exacte de la douleur de la zone coccygienne est inconnue, mais elle est beaucoup moins fréquente que la lombalgie.
Étiologie de la douleur de la zone coccygienne
La douleur de la région coccygienne peut provenir de troubles de
Le coccyx lui-même
Structures anatomiques à proximité
Les troubles coccygiens causes de coccydynie (douleur coccygienne) sont le plus souvent des
Troubles musculosquelettiques traumatiques ou non traumatiques: hypermobilité, éperons osseux, luxations, fractures et autres blessures, et arthrose
Les cancers coccygiens sont des causes plus rares de douleur coccygienne. Les cancers peuvent être primitifs (c'est-à-dire, provenant du coccyx) ou secondaires. Les cancers coccygiens primitifs comprennent le chordome, qui est souvent mortel. Les cancers secondaires du coccyx peuvent résulter d'une invasion directe par des structures adjacentes (p. ex., d'un cancer rectal) ou être métastatiques à partir de tumeurs malignes ailleurs dans le corps.
Les troubles des structures anatomiques situées à proximité causes de douleurs de la zone coccygienne comprennent les suivants
Fissures anales
Maladie de Crohn
Hémorroïdes
Bursite ischiatique
Le syndrome du releveur (spasme du muscle releveur de l'anus).
Abcès péri-anal ou périrectal
Kystes périneuraux du sacrum (kystes de Tarlov)
Kystes pilonidaux
Douleur musculaire du piriforme
Douleur du nerf honteux
Tumeurs rétrorectales (c'est-à-dire, tumeurs situées dans l'espace postérieur par rapport au rectum et en avant du sacrum/coccyx, comme un hamartome rétorectal)
Douleurs sacro-iliaques
Les cancers colorectaux se manifestent rarement par une douleur de la région coccygienne, sauf s'ils ont envahi les structures osseuses à proximité.
Physiopathologie de la douleur de la région coccygienne
Le coccyx est constitué de 3 à 5 corps vertébraux coccygiens situés à l'extrémité inférieure de la colonne vertébrale. Le coccyx est situé au niveau de la ligne médiane, juste en dessous du sacrum, en arrière du rectum, et 2 travers de doigt au-dessus/en arrière de l'anus.
La douleur provoquée par un trouble au niveau d'un site anatomique peut être rapportée à des régions adjacentes. En outre, les symptômes provenant d'une région peuvent provoquer ou aggraver les symptômes au niveau d'une autre région. Par exemple, une douleur coccygienne peut provoquer des spasmes/une défense musculaires réactifs de tous les muscles du plancher pelvien, entraînant une douleur myofasciale du plancher pelvien. Inversement, une douleur, un spasme et une contraction des muscles du plancher pelvien qui s'attachent au coccyx peuvent provoquer des douleurs coccygiennes.
Une complication fréquente de la coccydynie non traitée est que les patients peuvent développer un syndrome de douleur chronique.
Évaluation de la douleur de la région coccygienne
L'évaluation de la douleur de la région coccygienne est difficile parce que ses causes peuvent impliquer l'un des nombreux systèmes d'organes généralement traités par différents médecins (p. ex., orthopédistes, gastro-entérologues, gynécologues). L'orientation vers le mauvais spécialiste peut retarder le diagnostic.
Anamnèse
L'anamnèse de la maladie actuelle doit identifier le début (en particulier, traumatique ou non) et la durée de la douleur et si les symptômes ont changé au fil du temps. L'emplacement spécifique des symptômes doit être déterminé aussi précisément que possible. Puisque de nombreux patients ont une mauvaise appréhension de leur région coccygienne et ont des difficultés à identifier le site spécifique de leur douleur, il peut être utile de demander au patient de pointer un doigt vers le site spécifique de la douleur la plus intense.
Interroger le patient sur les facteurs aggravants ou apaisants, en particulier la position assise, les mouvements et la défécation.
D'autres symptômes à noter sont la chaleur, le gonflement et la présence de pus/écoulement au niveau de la région.
On demande aux patients s'ils ont noté du sang dans la cuvette des toilettes ou sur du papier toilette après s'être essuyés. Une anamnèse sexuelle concernant les récentes activités anoréceptives peut également être pertinente.
Les symptômes neurologiques du périnée ou des membres inférieurs doivent être recherchés, dont un engourdissement, une faiblesse, des paresthésies et des difficultés à contrôler la vessie ou les intestins.
La revue des systèmes peut aider le médecin à évaluer les systèmes d'organes les plus susceptibles d'être impliqués. Une attention particulière doit être portée aux symptômes cutanés ceux liés au système musculosquelettique, colorectal et gynécologique.
La recherche des antécédents médicaux se concentre sur l'existence d'antécédents de douleurs musculosquelettiques pelviennes, de kystes pilonidaux, de troubles anorectaux, d'infections sexuellement transmissibles ou de tumeurs malignes (en particulier de tumeurs pelviennes).
Examen clinique
L'examen clinique de la région coccygienne commence par l'inspection et la palpation légère de la peau à la recherche de masses, rougeurs, chaleur, traces de fistule ou d'écoulement.
Une palpation attentive, systématique et plus profonde est effectuée pour identifier la zone spécifique de la douleur et distinguer la douleur du coccyx lui-même, par rapport à la douleur des structures voisines. Ainsi, la palpation doit comprendre les zones au-dessus des muscles paracoccygiens, des muscles piriformes, les articulations lombosacrées, les articulations sacro-iliaques, les tubérosités ischiatiques et la région anale. Des manœuvres supplémentaires de provocation peuvent être effectuées pour nombre de ces sites, en fonction de la suspicion clinique.
Dans les cas où la palpation coccygienne ne révèle pas de sensibilité reproduisant les symptômes du patient, un examen clinique interne supplémentaire peut être approprié. Par exemple, un toucher rectal doit être effectué pour détecter les hémorroïdes thrombosées ou hémorragiques, une sensibilité avec ou sans masse et la présence de sang. Le tonus rectal doit être noté. Le coccyx lui-même peut être palpé lors de l'examen rectal.
Un examen neurologique du périnée (en particulier de la sensibilité et du réflexe anal) et des membres inférieurs (dont la fonction motrice, sensorielle et réflexe) est effectué.
Signes d'alarme
Les signes suivants sont particulièrement préoccupants:
Symptomatologie neurologique
Symptômes généraux, tels qu'une perte de poids inexpliquée, une fatigue, une fièvre et une adénopathie
Douleur constante, chronique, non traumatique
Drainage purulent
Masse rectale
Saignement ou douleur rectales lors de la défécation
Interprétation des signes
La palpation directe, externe et focale du coccyx est souvent la partie la plus importante et la plus révélatrice de l'examen clinique. Chez la grande majorité des patients présentant un trouble coccygien, cette palpation reproduira la douleur ressentie en position assise. Si la palpation externe du coccyx ne peut reproduire une telle douleur, l'examen interne et la recherche d'autres explications à la douleur du patient deviennent d'autant plus importants.
La douleur coccygienne est généralement localisée sur la ligne médiane, sur une surface équivalente à 2 doigts en arrière/en haut de l'anus. Une douleur latéralisée d'un côté ou de l'autre évoque un trouble non coccygien. Une douleur plus grave en position assise suggère un trouble coccygien (si la douleur est située au niveau de la ligne médiane) ou une bursite ischiatique (si la douleur est située au niveau de la fesse inférieure à droite ou à gauche). Les douleurs coccygiennes sont particulièrement aggravées en position assise penché en arrière. Une douleur qui s'aggrave initialement lors de la transition de la position assise à la position debout évoque une hypermobilité coccygienne probable. Une douleur qui s'aggrave pendant la défécation évoque une fissure anale ou une rectite, bien que ce symptôme soit parfois dû à une pathologie coccygienne.
Un gonflement externe sensible suggère un abcès péri-anal ou un kyste pilonidal. Un œdème douloureux à l'examen rectal suggère un abcès périrectal. Un gonflement ou une masse non douloureux à l'examen rectal suggèrent une tumeur.
Un drainage purulent évoque un kyste pilonidal, un abcès péri-anal ou une fistule (p. ex., de la maladie de Crohn).
Le sang sur le papier toilette après les selles est typique des hémorroïdes. Le sang dans la cuvette des toilettes peut provenir d'hémorroïdes ou de saignements gastro-intestinaux d'autres troubles anorectaux, tels que la rectocolite hémorragique ou un cancer colorectal. Le sang mélangé dans les selles suggère une source de saignement située au-dessus de l'anus.
Les patients qui se présentent initialement avec des troubles coccygiens focaux n'ont généralement aucun déficit neurologique à l'examen clinique. Ainsi, la présence de symptômes neurologiques ou des signes à l'examen clinique général suggèrent des sources non coccygiennes, telles qu'un syndrome de la queue de cheval, une radiculopathie lombosacrée ou une irritation du nerf sciatique au niveau du muscle piriforme.
Examens complémentaires
Les tests sont effectués en fonction des diagnostics suspectés.
Si les signes sont localisés au niveau coccyx, l'imagerie n'est pas nécessaire, en particulier en cas de douleur aiguë durant moins de 2 semaines après un traumatisme mineur. Cependant, si les symptômes persistent au-delà de 2 semaines, ou en cas de traumatisme plus important, des radiographies doivent être effectuées. Les incidences latérales avec collimation (pour se focaliser sur la zone d'intérêt, diminuer l'exposition du patient au rayonnement et améliorer la qualité de l'image) sont préférées en position assise et debout, pour évaluer les mouvements excessifs/anormaux (instabilité dynamique) en position assise (1) .
Les patients présentant des symptômes persistants qui n'ont pas de cause évidente à l'anamnèse et à l'examen clinique peuvent bénéficier de l'imagerie par résonance magnétique pelvienne (IRM), qui permet d'évaluer à la fois les os et les tissus mous, et ainsi rechercher des tumeurs malignes et des masses. La tomodensitométrie (TDM) est une alternative, mais l'IRM a une meilleure définition des structures des tissus mous et n'expose pas le patient aux rayonnements ionisants.
Les masses, les ulcères et/ou les saignements anorectaux peuvent être évalués par coloscopie, sigmoïdoscopie ou proctoscopie.
Les examens sanguins sont généralement inutiles sauf en cas de suspicion d'infection sous-jacente, dans ce cas les tests pourraient comprendre une numération formule sanguine, une vitesse de sédimentation érythrocytaire, une protéine C réactive et des tests diagnostiques pour les infections sexuellement transmissibles. Une analyse d'urine n'est généralement pas nécessaire en cas de douleur pelvienne postérieure, mais est utile en cas de symptômes de la région antérieure (vessie).
Référence pour l'évaluation
1. Maigne JY, Guedj S, Straus C: Idiopathic coccygodynia. Lateral roentgenograms in the sitting position and coccygeal discography. Spine (Phila Pa 1976) 19(8):930-934, 1994. doi:10.1097/00007632-199404150-00011
Traitement de la douleur de la région coccygienne
Traitement de la cause
Le traitement est celui de la maladie causale (1).
Le traitement des troubles coccygiens commence souvent par des analgésiques oraux et l'utilisation de coussins pour soulager la pression coccygienne en position assise. D'autres traitements peuvent comprendre des injections d'anesthésiques et de corticostéroïdes locaux et, dans de rares cas, une amputation chirurgicale du coccyx (coccygectomie).
Les syndromes de douleurs musculosquelettiques pelviennes (telles que les douleurs articulaires sacro-iliaques, les douleurs myofasciales du piriforme, les douleurs du plancher pelvien, la bursite ischiatique) répondent souvent bien à une association de kinésithérapie et d'injections d'anesthésiques et de corticostéroïdes locaux.
Une consultation et un traitement spécialisées peuvent être nécessaires avec un chirurgien colorectal, un gastro-entérologue ou un gynécologue, en fonction du système d'organe impliqué. Un bilan diagnostique et un traitement en temps opportun sont nécessaires pour éviter la complication d'un syndrome de douleur chronique.
Référence pour le traitement
1. Foye PM. Coccydynia: Tailbone Pain. Phys Med Rehabil Clin N Am 28(3):539-549, 2017. doi:10.1016/j.pmr.2017.03.006
Points clés
Les patients ont souvent des difficultés à localiser la douleur coccygienne, elle peut donc être causée par des troubles de nombreux systèmes d'organes différents.
La symptomatologie des troubles coccygiens se situe généralement sur la ligne médiane.
Les manifestations latéralisées sont plus susceptibles de représenter des troubles extra-coccygiens, et les examens doivent être guidés par des signes spécifiques.
L'évaluation et le traitement peuvent nécessiter une collaboration entre les spécialistes de la médecine musculosquelettique, du traitement de la douleur, des troubles colorectaux et de la kinésithérapie du plancher pelvien.
Une complication fréquente de la douleur de la zone coccygienne est un syndrome de douleur chronique, qui peut être évité par une évaluation et un traitement pratiqués en temps opportun.