Médicaments de l'insuffisance cardiaque

ParNowell M. Fine, MD, SM, Libin Cardiovascular Institute, Cumming School of Medicine, University of Calgary
Vérifié/Révisé sept. 2022
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L'insuffisance cardiaque est un syndrome de dysfonctionnement ventriculaire (voir Insuffisance cardiaque).

Le traitement médicamenteux de l'insuffisance cardiaque comprend les éléments suivants

Le traitement médicamenteux pour la prise en charge à long terme et l'amélioration de la survie comprend

Tous les patients doivent recevoir des informations claires et explicites sur leurs médicaments, dont

  • L'importance du renouvellement des ordonnances au moment approprié

  • L'importance de l'observance du traitement

  • Comment reconnaître les effets indésirables

  • Quand contacter leur médecin

Sélection de médicaments pour l'insuffisance cardiaque

Le choix du médicament dépend du type d'insuffisance cardiaque et des caractéristiques individuelles du patient. La classification la plus courante de l'insuffisance cardiaque actuellement utilisée classe les patients en

Insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite

Dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite habituelle, la norme de soins comprend les quatre classes de thérapies suivantes, considérées comme les «thérapies fondamentales» de la prise en charge de l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite:

  • bêta-Bloqueur

  • Inhibiteur du système rénine-angiotensine-aldostérone (RAAS) (généralement un inhibiteur de l'angiotensine et de la néprilysine (ARNI), bien qu'un inhibiteur de l'ECA ou un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine puisse également être utilisé si l'ARNI n'est pas toléré)

  • Antagoniste de l'aldostérone

  • SGLT2

Ces quatre classes de médicaments ont été étudiées dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite et ont montré un bénéfice à long terme dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite. Le traitement est généralement titré jusqu'à la dose maximale tolérée. Les patients reçoivent généralement un médicament de chaque classe. Les patients pouvant prendre l'une de ces classes de médicaments avant de développer une insuffisance cardiaque, l'ordre de début du traitement et la vitesse d'augmentation de la titration sont généralement spécifiques du patient.

L'ajout d'un inhibiteur du cotransporteur sodium-glucose 2 (SGLT2), la dapagliflozine ou l'empagliflozine (1), a été démontré réduire la morbidité et la mortalité quand ajouté aux soins standards chez les patients présentant des taux élevés de peptide natriurétique; le bénéfice était similaire chez les patients diabétiques et non diabétiques.

D'autres thérapies sont utilisées dans des contextes spécifiques au patient (p. ex., inhibiteurs sinusaux pour abaisser la fréquence cardiaque si les patients ne tolèrent pas les bêta-bloqueurs).

Insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée

Dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, un moins grand nombre de médicaments a été suffisamment étudié. Cependant, les inhibiteurs de l'ECA, les antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II ou les antagonistes de l'aldostérone (antagonistes des récepteurs minéralocorticoïdes) sont souvent utilisés pour traiter l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée et/ou des comorbidités associées (telles qu'une hypertension et une dysfonction rénale), bien que le bénéfice en termes de survie n'ait pas été démontré dans les essais cliniques et, par conséquent, ne sont pas considérés comme une norme de soins.

Les inhibiteurs de l'angiotensine et de la néprilysine (ARNI) peuvent réduire les hospitalisations pour insuffisance cardiaque, mais n'améliorent pas les autres résultats.

Dans un essai clinique récent, l'ajout de l'inhibiteur de SGLT2, empagliflozine, au traitement habituel a été montré réduire la mortalité et les hospitalisations pour insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée (2).

Les bêta-bloqueurs ne doivent être utilisés qu'en présence d'une autre indication (p. ex., contrôle de la fréquence cardiaque pendant la fibrillation auriculaire, angor, après infarctus du myocarde). En cas d'insuffisance cardiaque sévère avec fraction d'éjection préservée, l'abaissement de la fréquence cardiaque (p. ex., par un bêta-bloqueur) peut exacerber les symptômes parce que le volume systolique est relativement fixe en raison d'un dysfonctionnement diastolique sévère. Chez ces patients, le débit cardiaque dépend de la fréquence cardiaque et l'abaissement de la fréquence cardiaque peut donc réduire le débit cardiaque au repos et/ou à l'effort.

En cas de cardiomyopathie hypertrophique, infiltrante, restrictive, la digoxine est inefficace et peut être nocive. En outre, le traitement par vasodilatateur peut également être mal toléré et n'a pas montré de bénéfice chez ces patients.

Insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection légèrement réduite

Dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection légèrement réduite, il peut y avoir un bénéfice spécifique des inhibiteurs des récepteurs de l’angiotensine et de la néprilysine, bien que cette possibilité nécessite une confirmation.

Les patients qui ont une insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection légèrement réduite bénéficient également de l'ajout d'un inhibiteur de SGLT2, tel que l'empagliflozine, aux soins standards.

Références pour la sélection des médicaments

  1. 1. Packer M, Anker SD, Butler J, et al: Cardiovascular and renal outcomes with empagliflozin in heart failure. N Engl J Med 383(15):1413-1424, 2020. doi: 10.1056/NEJMoa2022190. Epub 2020 Aug 28. PMID: 32865377.

  2. 2. Anker SD, Butler J, Filippatos G, et al: Empagliflozin in heart failure with a preserved ejection fraction. N Engl J Med 385(16):1451-1461, 2021. doi: 10.1056/NEJMoa2107038. Epub 2021 Aug 27. PMID: 34449189.

Classes de médicaments de l'insuffisance cardiaque

Antagonistes de l'aldostérone

L'aldostérone pouvant être produite indépendamment du système rénine-angiotensine, ses effets indésirables ne sont pas complètement inhibés même par une utilisation maximale des inhibiteurs de l'ECA et des antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II. Ainsi, les antagonistes de l'aldostérone (également appelés antagonistes des récepteurs minéralocorticoïdes) sont souvent utilisés, en particulier en cas de symptômes modérés à sévères ou de signes d'insuffisance cardiaque.

Les médicaments classiques comprennent la spironolactone 25 à 50 mg par voie orale 1 fois/jour et l'éplérénone 25 à 100 mg par voie orale 1 fois/jour (ne cause pas de gynécomastie chez les hommes). Les antagonistes de l'aldostérone peuvent réduire la mortalité, y compris par mort subite, en cas de fraction d'éjection du ventricule gauche < 30% et en cas d'insuffisance cardiaque chronique ou aiguë compliquant un infarctus du myocarde aigu.

Les suppléments de potassium doivent être arrêtés. La kaliémie et la créatinine doivent être vérifiées toutes les 1 à 2 semaines pendant les 4 à 6 premières semaines et après les changements de dose. La posologie est abaissée si la kaliémie se situe entre 5,0 et 5,5 mEq/L (5,5 mmol/L) et interrompue si la kaliémie est > 5,5 mEq/L (5,5 mmol/L), si la créatinine augmente au-dessus de 2,5 mg/dL (220 micromoles/L) ou si les anomalies ECG de l'hyperkaliémie sont présentes. Les antagonistes de l'aldostérone ne doivent pas être utilisés chez les patients recevant à la fois un inhibiteur de l'ECA et un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II du fait du risque élevé d'hyperkaliémie et d'insuffisance rénale.

Chez les patients en insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, un antagoniste de l'aldostérone plus un inhibiteur de l'ECA ou un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II est préférable à l'association d'un inhibiteur de l'ECA et d'un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II.

Chez les patients en insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, la spironolactone réduit l'hospitalisation pour insuffisance cardiaque et réduit probablement la mortalité cardiovasculaire (1). Ainsi, les antagonistes de l'aldostérone doivent être utilisés chez les patients en insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, en particulier en cas de surcharge volumique et/ou d'antécédents d'hospitalisation pour insuffisance cardiaque. Les diurétiques de l'anse peuvent être minimisés si nécessaire pour permettre l'utilisation des antagonistes de l'aldostérone.

Inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (ECA)

Tous les patients qui présentent une insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite doivent recevoir des inhibiteurs de l'ECA, sauf en cas de contre-indication (p. ex., du fait d'une créatininémie > 2,8 mg/dL [> 250 micromoles/L], d'une sténose bilatérale des artères rénales, d'une sténose des artères rénales sur rein unique ou d'un antécédent d'angio-œdème/œdème de Quincke dû à des inhibiteurs de l'ECA).

Les inhibiteurs de l'ECA réduisent la production de l'angiotensine II et la dégradation de la bradykinine et des médiateurs qui affectent le système nerveux sympathique, la fonction endothéliale, le tonus vasculaire et la fonction myocardique. Les effets hémodynamiques comprennent

  • Vasodilatation artérielle et veineuse

  • Diminution soutenue de la pression de remplissage du ventricule gauche au repos et à l'effort

  • Diminution de la résistance vasculaire systémique

  • Effets favorables sur le remodelage ventriculaire

Les inhibiteurs de l'ECA prolongent la survie et réduisent les hospitalisations pour insuffisance cardiaque. En cas d'athérosclérose et de maladie vasculaire, ces médicaments réduisent le risque d'infarctus du myocarde et d'accident vasculaire cérébral. Chez le diabétique, ils retardent l'apparition de la néphropathie. Ainsi, les inhibiteurs de l'ECA peuvent être utilisés en cas de dysfonctionnement diastolique et en présence de l'un de ces troubles.

La dose initiale classiquement doit être basse (habituellement un quatrième à la moitié de la dose cible en fonction de la pression artérielle et de la fonction rénale); la dose est progressivement ajustée vers le haut sur 8 semaines que possible, alors poursuivi indéfiniment. Les posologies cibles habituelles des médicaments représentatifs comprennent l'énalapril 10 à 20 mg 2 fois/jour, le lisinopril 20 à 30 mg 1 fois/jour, et le ramipril 5 mg 2 fois/jour, il en existe de nombreux autres.

Si les effets hypotenseurs (plus marqués en cas d'hyponatrémie ou de déplétion volémique) sont gênants, ils peuvent souvent être minimisés en séparant l'administration des autres médicaments hypotenseurs, en réduisant la dose des diurétiques associés, en utilisant un inhibiteur de l'ECA à action prolongée (p. ex., le périndopril), ou en prenant la dose au coucher. Les inhibiteurs de l'ECA entraînent souvent une insuffisance rénale modérée réversible due à une vasodilatation des artérioles efférentes glomérulaires. Une augmentation initiale de 20 à 30% de la créatinine n’est pas une raison d’arrêter le médicament mais nécessite une surveillance plus stricte, des augmentations plus lentes des posologies, la réduction de la dose de diurétiques, ou contre-indique les AINS. L'effet de l'aldostérone étant réduit, en particulier chez le patient recevant une supplémentation en potassium, il peut en résulter une rétention de potassium (hyperkaliémie). Une toux est observée chez 5 à 15% des patients, probablement car la bradykinine s’accumule, mais d’autres causes de toux doivent également être recherchées. Parfois, une éruption cutanée ou une dysgueusie peuvent être observées. L'angio-œdème/œdème de Quincke est rare, mais peut être fatal et est une contre-indication des inhibiteurs de l'ECA. Comme alternative, on peut utiliser des antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II, bien qu'une allergie croisée n'ait que rarement été rapportée. Tous deux sont contre-indiqués pendant la grossesse.

L'ionogramme sanguin et la fonction rénale doivent être évalués avant de débuter un inhibiteur de l'ECA, à 1 mois et après chaque augmentation importante de la posologie ou modification de l'état clinique. En cas de déshydratation ou de mauvaise fonction rénale en rapport avec une affection intercurrente, on peut être amené à réduire ou à arrêter de manière transitoire l'inhibiteur de l'ECA.

Dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée un essai contrôlé randomisé de l'inhibiteur de l'ECA périndopril a démontré améliorer la capacité d'effort. Il n'a pas amélioré la survie, malgré un taux élevé de passage du placebo à l'inhibiteur de l'ECA dans cet essai (2). Compte tenu de la prévalence très élevée de l'hypertension dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, il est raisonnable d'utiliser un inhibiteur de l'ECA pour contrôler l'hypertension chez ces patients, car ces médicaments peuvent avoir des effets secondaires bénéfiques sur la capacité d'exercice chez ces patients.

Antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II

Ces médicaments n’ont pas démontré leur supériorité par rapport à des inhibiteurs de l’ECA, mais sont moins susceptibles d’entraîner une toux ou un angio-œdème/œdème de Quincke; ils peuvent être utilisés lorsque ces effets indésirables interdisent l’utilisation d’inhibiteurs de l'ECA.

Dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite chronique, les inhibiteurs de l'ECA et les antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II sont probablement tout aussi efficaces. Les doses cibles orales habituelles sont valsartan 160 mg 2 fois/jour, candésartan 32 mg 1 fois/jour et losartan 50 à 100 mg 1 fois/jour. L'introduction, l'ajustement des doses vers le haut et le suivi des antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II et des inhibiteurs de l'ECA sont similaires. Les inhibiteurs de l'ECA, les antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II peuvent entraîner une insuffisance rénale réversible et ils peuvent devoir être arrêtés ou leur dose réduite transitoirement en cas de maladie pouvant provoquer une déshydratation.

L'ajout d'un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II à un protocole composé d'un inhibiteur de l'ECA, d'un bêta-bloqueur et d'un antagoniste de l'aldostérone est peu susceptible d'être utile et doit être évité étant donné le risque d'hyperkaliémie. Si un patient qui prend un inhibiteur de l'ECA ou un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II est toujours symptomatique, un antagoniste de l'aldostérone doit être instauré et/ou un inhibiteur de l'angiotensine et de la néprilysine doit être utilisé.

Dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, un vaste essai contrôlé randomisé du candésartan (3) a démontré une réduction du nombre d'hospitalisations pour insuffisance cardiaque récurrente; cependant, l'hospitalisation était un critère d'évaluation secondaire. Dans un autre essai, (4) l'irbésartan n'a pas été associé à une amélioration des résultats dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée. Par conséquent, les antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II ne doivent être utilisés dans le traitement de l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée que s'ils sont déjà utilisés pour traiter l'hypertension, la maladie diabétique rénale ou la microalbuminurie.

Les antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II sont contre-indiqués pendant la grossesse.

Inhibiteurs de l'angiotensine et de la néprilysine (ARNI)

Les inhibiteurs des récepteurs de l’angiotensine et de la néprilysine sont une nouvelle association médicamenteuse pour le traitement de l'insuffisance cardiaque. Ils comprennent un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II et une nouvelle classe de médicaments, les inhibiteurs de la néprilysine (p. ex., sacubitril). La néprilysine est une enzyme impliquée dans la dégradation des substances vasoactives telles que le BNP (brain [B-type] natriuretic peptide) et d'autres peptides. En inhibant la dégradation du BNP et d'autres peptides vasoactifs bénéfiques, ces médicaments abaissent la tension artérielle, diminuent la postcharge et augmentent la natriurèse. Les inhibiteurs de la néprilysine augmentent les taux de BNP, les taux de NTproBNP (qui ne sont pas augmentés par le médicament) doivent donc être utilisés à sa place pour le diagnostic et le traitement de l'insuffisance cardiaque.

Dans l'Insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, un grand essai contrôlé randomisé (5) a comparé le sacubitril/valsartan à l'énalapril chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque de classe II à IV de la NYHA (New York Heart Association) (voir tableau Classification NYHA de l'insuffisance cardiaque). Le sacubitril/valsartan réduit les principaux critères d'évaluation de la mortalité cardiovasculaire combinée ou des hospitalisations pour insuffisance cardiaque; le nombre de patients à traiter était de 21. Le sacubitril/valsartan a également réduit la mortalité toutes causes confondues. Ainsi, les inhibiteurs des récepteurs de l’angiotensine et de la néprilysine sacubitril/valsartan doivent être envisagés en cas d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite stable, en particulier en cas de symptômes de classe II ou III de la NYHA sous thérapie médicale optimale guidée par les directives et de taux élevés de peptide natriurétique avant de commencer le traitement. Des données sont en faveur de la transition précoce des patients de l'ECA/antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II aux inhibiteurs des récepteurs de l’angiotensine et de la néprilysine, même en milieu hospitalier où les patients auront moins de congestion pulmonaire et auront moins de réadmissions précoces.

Il existe 3 concentrations de sacubitril/valsartan: 24/26 mg, 49/51 mg et 97/103 mg, tous sont pris par voie orale 2 fois/jour. La dose initiale est de 49/51 mg par voie orale 2 fois/jour dans le cas des patients qui ont déjà pris un inhibiteur de l'ECA ou un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II et de 24/26 mg chez les patients qui prenaient auparavant une faible dose d'un inhibiteur de l'ECA ou d'un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II (p. ex., ≤ 10 mg/jour d'énalapril) ou chez les patients qui n'ont pas reçu d'inhibiteurs de l'ECA/antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II ou qui ont une tension artérielle basse ou limite. Les inhibiteurs de l'ECA doivent être arrêtés 36 heures avant l'initiation du sacubitril/valsartan. Les patients qui prenaient auparavant un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II peuvent simplement passer au sacubitril/valsartan sans passer par une période d'élimination.

Les complications associées à l'utilisation des inhibiteurs des récepteurs de l’angiotensine et de la néprilysine comprennent l'hypotension, l'hyperkaliémie, l'insuffisance rénale et l'angio-œdème/œdème de Quincke. Le sacubitril est associé au valsartan (un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II) en raison du risque accru d'angio-œdème/œdème de Quincke associé à l'utilisation du sacubitril seul ou en association avec un inhibiteur de l'ECA. Pour cette raison, le traitement combiné par ACE/inhibiteurs des récepteurs de l’angiotensine et de la néprilysine est absolument contre-indiqué.

Dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, un essai de phase 2 a montré que les inhibiteurs des récepteurs de l’angiotensine et de la néprilysine sacubitril/valsartan réduisaient les taux de NTproBNP à 12 semaines et le volume auriculaire gauche à 36 semaines. L'étude PARAGON HF réalisée dans une population stable de patients atteints d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée a montré une réduction non significative de la mort et de l'hospitalisation (6, 7). Cependant, il peut y avoir eu des taux d'hospitalisation plus faibles, une étude plus approfondie est nécessaire.

bêta-Bloqueurs

Dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, les bêta-bloqueurs, sauf contre-indication (asthme, bloc auriculo-ventriculaire de 2e ou 3e degré ou un antécédent d'intolérance significative), sont critiques pour le traitement et sont un adjuvant important des inhibiteurs de l'ECA chez ces patients. Dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, les bêta-bloqueurs sont au mieux commencés lorsque le patient n'a aucun élément en faveur d'une congestion pulmonaire. Des bêta-bloqueurs spécifiques tels que le carvédilol et le succinate de métoprolol (c'est-à-dire, le métoprolol à action prolongée) améliorent la fraction d'éjection du ventricule gauche, la survie et d'autres accidents cardiovasculaires majeurs en cas d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, y compris ceux qui présentent des symptômes sévères.

Chez les patients qui ont une insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, les bêta-bloqueurs n'ont pas montré de bénéfices évidents dans les essais cliniques. Cependant, des données de grands registres suggèrent que les bêta-bloqueurs sont associés à de meilleurs résultats dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, malgré la prévalence relativement élevée de l'incompétence chronotrope (c'est-à-dire, l'incapacité à augmenter la fréquence cardiaque en réponse à l'augmentation de la demande d'effort) dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée. Toutes les principales lignes directrices pour l'insuffisance cardiaque recommandent les bêta-bloqueurs comme traitement de première ligne ds pathologies dans lesquelles le contrôle de la fréquence ventriculaire est indiqué (c'est-à-dire, contrôle de la fréquence ventriculaire avec fibrillation auriculaire).

La posologie initiale doit être basse (un quart de la dose journalière cible), puis progressivement augmentée sur 8 semaines en fonction de la tolérance. Les effets inotropes négatifs du bêta-blocage peuvent initialement entraîner une dépression cardiaque et une rétention liquidienne. Dans de tels cas, une augmentation temporaire de la dose de diurétiques et un ralentissement de l'augmentation du titrage de la dose de bêta-bloqueurs est justifiée. La tolérance peut s'améliorer avec le temps et tout doit être fait pour atteindre les doses cibles. Les doses cibles orales habituelles sont carvédilol 25 mg 2 fois/jour (50 mg 2 fois/jour pour le patient de 85 kg), bisoprolol 10 mg 1 fois/jour, métoprolol 50 à 75 mg 2 fois/jour (tartrate) ou 200 mg 1 fois/jour (succinate à libération prolongée). Le carvédilol, un bêta-bloqueur non sélectif de 3e génération, est également un vasodilatateur à effets alpha-bloqueurs et antioxydants; c'est le bêta-bloqueur préféré et le plus largement étudié mais c'est le plus coûteux dans de nombreux pays. Certains bêta-bloqueurs (p. ex., bucindolol, xamotérol) ne semblent pas bénéfiques et peuvent être parfois nocifs.

En cas de décompensation sévère, les bêta-bloqueurs ne sont pas introduits avant que le patient soit stabilisé et qu'il n'y ait que peu d'éléments en faveur d'une rétention liquidienne. Chez les patients qui ont une insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite et une aggravation aiguë de l'insuffisance cardiaque et qui prennent déjà un bêta-bloqueur, la dose ne doit pas être diminuée ou arrêtée sauf en cas d'absolue nécessité. Souvent, la dose de bêta-bloqueur peut être poursuivie en cas d'aggravation aiguë de l'insuffisance cardiaque si la dose diurétique est temporairement augmentée.

Dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, après le traitement initial, la fréquence cardiaque et la consommation myocardique d'oxygène diminuent et le volume systolique et la pression de remplissage restent inchangés. Avec la réduction de la fréquence cardiaque, la fonction diastolique s'améliore. Le remplissage ventriculaire redevient proche de la normale (augmentation en protodiastole) et est moins restrictif. L'amélioration de la fonction myocardique est évaluable chez de nombreux patients après 6 à 12 mois; la fraction d'éjection et le débit cardiaque augmentent et la pression de remplissage du ventricule gauche diminue. La capacité d'effort augmente.

La digoxine

La digoxine inhibe la pompe Na-K (Na+, K+-ATPase). Elle a donc un effet inotrope positif faible; elle réduit l'activité sympathique et bloque le nœud auriculoventriculaire (ce qui ralentit la fréquence ventriculaire dans la fibrillation auriculaire ou prolonge l'espace PR en rythme sinusal), elle réduit la vasoconstriction et améliore le flux sanguin rénal. La digoxine est excrétée par les reins; la demi-vie est de 36 à 40 heures si la fonction rénale est normale.

La digoxine ne présente aucun bénéfice prouvé en termes de survie mais, lorsqu'elle est utilisée avec les diurétiques et un inhibiteur de l'ECA, elle permet de contrôler les symptômes en cas d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite. Cependant, en raison de la disponibilité d'un grand nombre de traitements fondés sur des preuves de l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, l'utilisation de la digoxine a diminué significativement et est réservée aux patients présentant des symptômes significatifs malgré un traitement optimal avec d'autres médicaments diminuant la mortalité. La digoxine ne doit pas être utilisée dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, sauf pour contrôler la fréquence cardiaque dans la fibrillation auriculaire concomitante ou pour augmenter la fonction du ventricule droit en cas d'insuffisance du ventricule droit. La digoxine a une efficacité maximale en cas de volume télédiastolique élevé du ventricule gauche et de B3. L'arrêt brutal de la digoxine peut augmenter la fréquence des hospitalisations et aggraver les symptômes.

Si la fonction rénale est normale, la digoxine 0,125 à 0,25 mg par voie orale 1 fois/jour selon l'âge, le sexe et la masse corporelle permet une digitalisation complète en 1 semaine environ (5 demi-vies). Une digitalisation plus rapide peut être réalisée par la digoxine 0,5 mg IV en 15 min suivi de 0,25 mg IV à 8 et 16 heures ou par 0,5 mg par voie orale suivi de 0,25 mg par voie orale à 8, 16 et 24 heures. Les habitudes de prescription varient largement d'un médecin et d'un pays à l'autre, mais en général, les doses sont inférieures à celles utilisées par le passé, et un taux résiduel de digoxine (8 à 12 heures post-dose) de 0,8 à 1,2 ng/mL (1-1,5 nmol/L) est préférable. De plus, contrairement au traitement de la fibrillation auriculaire, il n'y a généralement que peu de raisons pour digitaliser rapidement (c'est-à-dire de charger en digoxine) les patients qui ont une insuffisance cardiaque. Ainsi, commencer simplement la digoxine à 0,125 mg par voie orale 1 fois/jour (en cas de fonction rénale normale) ou la digoxine 0,125 mg par voie orale chaque lundi, mercredi et vendredi (en cas de fonction rénale anormale) est suffisant en cas d'insuffisance cardiaque.

Le risque d'intoxication par la digoxine est une préoccupation, en particulier en cas d'insuffisance rénale et peut-être chez la femme. Ces patients peuvent avoir besoin d'une posologie orale inférieure, de même que les patients âgés, les patients qui ont une masse maigre peu importante et les patients qui prennent également de l'amiodarone. La digoxine a une fenêtre thérapeutique étroite. Les effets toxiques les plus importants sont les troubles du rythme qui mettent en jeu le pronostic vital (p. ex., fibrillation ventriculaire, tachycardie ventriculaire, bloc auriculoventriculaire complet). La tachycardie ventriculaire bidirectionnelle, la tachycardie jonctionnelle non paroxystique qui apparaissent en présence d'une fibrillation auriculaire et d'une hyperkaliémie sont des signes graves d'intoxication digitalique. Des nausées, des vomissements, une anorexie, une diarrhée, une confusion, une amblyopie et, rarement, une xérophtalmie peuvent être observées. En cas d'hypokaliémie ou d'hypomagnésémie (souvent dues à la prise de diurétiques), une réduction des doses et des concentrations plasmatiques inférieures peuvent entraîner une intoxication. Il faut fréquemment contrôler l’ionogramme sanguin chez le patient sous diurétiques et digoxine, de sorte que les anomalies puissent être prévenues si possible; les diurétiques épargneurs du potassium peuvent être utiles.

En cas d’intoxication par la digoxine, il faut arrêter le médicament; et corriger les troubles hydro-électrolytiques (IV si les anomalies sont graves et la toxicité est aiguë). En cas d'effets toxiques sévères, le patient doit être admis en unité de soins intensifs et un antidote (fragments d'anticorps antidigoxine ovins) est administré si des troubles du rythme sont présents ou si une surdose importante est accompagnée d'une kaliémie > 5 mEq/L (> 5 mmol/L). Les fragments d'anticorps antidigoxine sont également utiles dans l'intoxication glycosidique due à une ingestion d'origine végétale. La posologie dépend du niveau de digoxine sérique à l'équilibre ou de la quantité totale ingérée. Les troubles du rythme ventriculaires doivent être traités par la lidocaïne ou la phénylhydantoïne. Un bloc auriculoventriculaire avec une fréquence ventriculaire lente peut nécessiter un stimulateur cardiaque transveineux temporaire. L'isoprotérénol est contre-indiqué parce qu'il augmente le risque de troubles du rythme ventriculaires.

Diurétiques

Des diurétiques sont administrés à tous les patients qui présentent une insuffisance cardiaque (indépendamment de la fraction d'éjection sous-jacente), qui ont une surcharge volumique actuelle ou non; la posologie est ajustée sur la dose la plus faible qui stabilise le poids et diminue les symptômes.

Les diurétiques de l'anse doivent être utilisés initialement pour le contrôle de la surcharge volumique, mais leur dose doit être réduite si possible en faveur des antagonistes de l'aldostérone.

Les diurétiques de l'anse couramment utilisés comprennent le furosémide, le bumétanide et le torsémide. La dose initiale de ces médicaments dépend du fait que le patient ait ou non déjà reçu des diurétiques de l'anse. Les doses de départ habituelles sont les suivantes: furosémide 20 à 40 mg par voie orale 1 ou 2 fois/jour, bumétanide 0,5 à 1,0 mg par voie orale 1 fois/jour et torsémide 10 à 20 mg par voie orale 1 fois/jour. Si nécessaire, les diurétiques de l'anse peuvent être titrés jusqu'à des doses de furosémide 120 mg par voie orale 2 fois/jour, de bumétanide 2 mg par voie orale 2 fois/jour et de torsémide 40 mg par voie orale 2 fois/jour en fonction de la réponse et de la fonction rénale. Le bumétanide et le torsémide ont une meilleure biodisponibilité que le furosémide. Si les patients passent d'un diurétique de l'anse à un autre, ils doivent recevoir des doses équivalentes. Le furosémide 40 mg est équivalent à 1 mg de bumétanide et tous deux sont équivalents à 20 mg de torsémide.

Dans les cas réfractaires, des diurétiques de l'anse IV ou la métolazone 2,5 à 10 mg par voie orale peuvent être utilisés pour un effet additif. La perfusion IV de furosémide (5 à 10 mg/h) ou d'un autre diurétique de l'anse peut être utile chez des patients sélectionnés en cas d'œdème grave. Un bolus de diurétique de l'anse doit être administré avant de commencer la perfusion intraveineuse et avant chaque augmentation du débit de perfusion.

Les diurétiques de l'anse (en particulier utilisés avec la métolazone) peuvent entraîner une hypovolémie avec hypotension, une hyponatrémie, une hypomagnésémie et une hypokaliémie sévère. La dose de diurétique nécessaire à la phase aiguë peut généralement être réduite de façon graduelle; l'objectif est la dose la plus faible permettant de maintenir la stabilité du poids et le contrôle les symptômes. Lorsque l'insuffisance cardiaque s'améliore, le diurétique peut être arrêté si d'autres médicaments améliorent la fonction cardiaque et soulagent les symptômes d'insuffisance cardiaque. Des doses de diurétiques plus importantes que nécessaires diminuent le débit cardiaque, altèrent la fonction rénale, induisent une hypokaliémie et augmentent la mortalité. L’ionogramme sanguin et la fonction rénale sont vérifiés, initialement quotidiennement (lorsque les diurétiques sont donnés IV) et par la suite, au besoin, en particulier après une augmentation de la dose.

Un antagoniste de l'aldostérone, la spironolactone ou l'éplérénone, peuvent être ajoutés pour compenser les effets de la perte de potassium provoquée par les diurétiques de l'anse à forte dose. Il peut en résulter une hyperkaliémie, en particulier lorsque des inhibiteurs de l'ECA ou des antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II sont également utilisés, l'ionogramme doit donc être régulièrement surveillé en particulier lorsqu'un trouble peut provoquer une déshydratation et un trouble rénal. Les antagonistes de l'aldostérone peuvent présenter un intérêt particulier dans l'insuffisance chronique du ventricule droit, dans lesquels la congestion hépatique induit des taux élevés d'aldostérone car son métabolisme est réduit. Pour réduire le risque d'hyperkaliémie, les antagonistes de l'aldostérone ne doivent généralement être administrés qu'aux patients dont le taux de potassium est < 5,0 mEq/L (< 5 mmol/L), la créatininémie < 2,5 mg/dL (< 221 micromoles/L), et le taux de filtration glomérulaire > 30 mL/min/1,73 m2. En outre, il convient de noter que la dose équivalente d'éplérénone est double de celle de la spironolactone (c'est-à-dire, spironolactone 25 mg = éplérénone 50 mg).

Les diurétiques thiazidiques ne sont normalement pas utilisés seuls, sauf s'ils sont administrés en traitement de l'hypertension; cependant, un diurétique thiazidique peut être ajouté à un diurétique de l'anse pour augmenter la diurèse et réduire la dose de diurétiques de l'anse. L'hydrochlorothiazide, la métolazone et la chlorthalidone peuvent être utilisés de cette manière.

On apprend aux patients sérieux à prendre des doses diurétiques additionnelles selon les besoins lorsque le poids ou les œdèmes périphériques augmentent. Ils doivent consulter un médecin rapidement si la prise de poids persiste.

Les antagonistes des récepteurs de la vasopressine (hormone antidiurétique) ne sont pas fréquemment utilisés, bien qu'ils puissent être utiles dans les cas d'hyponatrémie réfractaire sévère chez les patients souffrant d'insuffisance cardiaque.

Inhibiteurs du nœud sinusal

Il existe un courant Na/K vers l'intérieur qui circule à travers un certain canal contrôlé (canal funny ou "f") dans les cellules du nœud sinusal (stimulateur cardiaque) situées dans l'oreillette postérieure droite. Ce courant est parfois appelé "inward funny current (If)". L'inhibition de ce courant prolonge le temps nécessaire à la réalisation de la dépolarisation spontanée critique des cellules du stimulateur cardiaque et diminue ainsi la fréquence cardiaque.

L'ivabradine est un bloqueur du canal If qui agit au niveau du nœud sinusal pour ralentir la fréquence cardiaque. Les récepteurs n'étant présents que dans les cellules stimulatrices cardiaques, ces médicaments n'ont pas d'autres effets cardiaques (c'est-à-dire qu'ils n'affectent pas directement la contractilité) et ne sont pas utiles dans le traitement des patients qui ne sont pas en rythme sinusal. L'ivabradine est actuellement recommandés en cas d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite qui présentent une insuffisance cardiaque symptomatique, un rythme sinusal normal et un rythme cardiaque > 70 battements/minute malgré un traitement médical recommandé par les directives (qui doit comprendre des bêta-bloqueurs). Généralement, les patients qui peuvent tirer profit de l'ivabradine sont ceux qui ont une insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, qui présentent des symptômes de classe II ou III de la NYHA (New York Heart Association) (voir tableau Classification NYHA de l'insuffisance cardiaque) et une fréquence cardiaque > 70 battements/min et qui reçoivent la bonne dose bêta-bloquante ou qui ne peuvent tolérer une augmentation supplémentaire de la dose de bêta-bloqueur (8).

La dose initiale d'ivabradine est de 2,5 à 5 mg par voie orale 2 fois/jour, titrée à 2 semaines d'intervalle pour obtenir une fréquence cardiaque de 50 à 60 battements/minute; la dose maximale est de 7,5 mg 2 fois/jour.

L'ivabradine est actuellement le seul médicament de cette classe à être utilisé.

Inhibiteurs du cotransporteur sodium-glucose de type 2 (SGLT2i)

Les inhibiteurs de SGLT2 sont utilisés dans le traitement du diabète pour bloquer la réabsorption du glucose, provoquant ainsi une glycosurie et une diminution de la glycémie. Ils peuvent également avoir des effets sur le myocarde et la vascularisation. Ces médicaments ont été précédemment démontrés prévenir l'apparition de l'insuffisance cardiaque chez les patients diabétiques de type 2. Un membre de cette classe, la dapagliflozine, a été démontré améliorer les symptômes et la qualité de vie et diminuer l'hospitalisation et la mortalité en cas d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite lorsqu'elle est ajouté aux soins standards chez les patients qui ont des taux élevés de peptide natriurétique; le bénéfice était similaire chez les patients diabétiques et non diabétiques (9). Dans un essai clinique récent, l'ajout de l'inhibiteur de SGLT2, l'empagliflozine, au traitement habituel a été montré réduire les hospitalisations et la mort en cas d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, avec ou sans diabète (10).

La dapagliflozine et l'empagliflozine peuvent être administrées 10 mg par voie orale 1 fois/jour. Sous l'effet du traitement, on observe une légère diminution (10 à 15%) du taux de filtration glomérulaire estimé qui ne progresse pas, une glycosurie et une légère réduction du poids corporel. Les risques comprennent l'infection fongique génitale et, chez les diabétiques, un très faible risque d'hypoglycémie et d'acidocétose diabétique. Ces médicaments ne sont généralement pas indiqués en cas de diabète de type I, d'hypotension artérielle, de taux de filtration glomérulaire estimé (eGFR) bas (< 30 mL/min/1,73 m2), ou de détérioration rapide de la fonction rénale.

D'autres inhibiteurs de SGLT2 (p. ex., canagliflozine, ertugliflozine) n'ont pas été étudiés directement dans l'insuffisance cardiaque, mais une analyse secondaire des études sur le diabète suggère qu'ils peuvent également être bénéfiques.

Vasodilatateurs

L'association d'hydralazine et de dinitrate d'isosorbide est bénéfique chez le patient vraiment intolérant aux inhibiteurs de l'ECA et au antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II (habituellement du fait d'un dysfonctionnement rénal important), bien que des études limitées montrent un bénéfice à long terme de cette association. Cependant, chez les patients d'ascendance africaine, cette association, lorsqu'elle a été ajoutée au traitement standard, a été démontrée réduire la mortalité et les hospitalisations et améliorer la qualité de vie. En tant que vasodilatateurs, ces médicaments améliorent l'hémodynamique, réduisent l'insuffisance valvulaire et augmentent la capacité d'effort sans entraîner d'atteinte rénale importante.

Lorsque utilisé à la place du traitement ACE/antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II, l'hydralazine est commencée à 25 mg par voie orale 4 fois/jour et augmentée toutes les 3 à 5 jours jusqu'à une posologie cible totale de 300 mg/jour, bien que nombre de patients ne puissent tolérer une dose > 200 mg/jour du fait de l'hypotension. Le dinitrate d'isosorbide est débuté à 20 mg par voie orale 3 fois/jour (avec un intervalle de 12 heures sans nitrate) et les doses sont augmentées jusqu'à une dose cible de 40 à 50 mg 3 fois/jour. On ignore si des doses plus faibles (fréquemment utilisées en pratique clinique) sont bénéfiques à long terme. En général, les vasodilatateurs ont été remplacés par des inhibiteurs de l'ECA, qui sont plus simples à utiliser, qui sont habituellement mieux tolérés et dont on a démontré les effets bénéfiques supérieurs.

Lorsqu'elle est ajoutée au traitement par inhibiteurs de l'ECA/antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II, le traitement par hydralazine-nitrate peut être bénéfique chez les patients d'ascendance africaine atteints d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite. Dans ce cas, la dose initiale est l'hydralazine 37,5 mg et l'isosorbide dinitrate 20 mg par voie orale 3 fois/jour, avec une dose maximale de 75 mg et 40 mg 3 fois/jour. Ces doses sont également disponibles en association à dose fixe. La décision d'ajouter ou de substituer un traitement par nitrate-hydralazine à un ECA/antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II chez des patients d'origine africaine atteints d'insuffisance cardiaque est spécifique du patient et est souvent déterminée par la tolérance aux médicaments et la charge symptomatique. En général, le traitement par des inhibiteurs du système rénine-angiotensine-aldostérone (ACE, antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II, ou inhibiteurs de l'angiotensine et de la néprilysine [ARNI]) doit être utilisé dans cette population, s'il est toléré.

Les dérivés nitrés à eux seuls peuvent soulager les symptômes de l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite; on peut apprendre aux patients à utiliser la nitroglycérine en spray sublinguale selon les besoins en cas de dyspnée aiguë et en patch transdermique pour les dyspnées nocturnes ou d'effort. Dans l'insuffisance cardiaque avec une fraction d'éjection réduite les dérivés nitrés sont sûrs, efficaces et bien tolérés et sont particulièrement efficaces en cas d'insuffisance cardiaque et d'angor. Les effets indésirables comprennent les céphalées et l'hypotension. Le mononitrate d'isosorbide a été testé dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée (11), où il a été démontré qu'il était associé à des effets indésirables accrus (p. ex., céphalées) et à une diminution de l'activité physique. Ainsi, l'utilisation de routine des nitrates à action prolongée doit être évitée dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée.

D'autres vasodilatateurs tels que les inhibiteurs calciques ne sont pas utilisés dans le dysfonctionnement systolique. Les dihydropyridiniques à courte durée d'action (p. ex., nifédipine) et les non dihydropyridiniques (p. ex., diltiazem, vérapamil) peuvent être délétères. Cependant, l'amlodipine et la félodipine sont mieux tolérées et peuvent être utiles en cas d'insuffisance cardiaque et d'angor ou d'HTA associés. Les deux médicaments peuvent provoquer un œdème périphérique; rarement, l’amlodipine peut entraîner un œdème du poumon. La félodipine ne doit pas être prise avec du jus de pamplemousse, qui augmente significativement les taux plasmatiques et les effets indésirables en inhibant la voie métabolique du cytochrome P-450. En cas d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, les inhibiteurs calciques dihydropyridiniques tels que l'amlodipine peuvent être utilisés au besoin pour traiter l'hypertension ou l'ischémie; les non-dihydropyridines telles que le diltiazem ou le vérapamil peuvent être utilisées pour contrôler la fréquence ventriculaire de la fibrillation auriculaire. Le vérapamil est souvent utilisé dans la cardiomyopathie hypertrophique.

Autres médicaments

Différents médicaments inotropes positifs sont évalués dans l'insuffisance cardiaque, mais en dehors de la digoxine, ils entraînent une augmentation de la mortalité. Ces médicaments peuvent être regroupés selon le mode d'action adrénergique (noradrénaline, adrénaline, dobutamine, dopamine) ou non adrénergique (énoximone, milrinone, lévosimendan [sensibilisateurs au calcium]). Les perfusions IV régulières d'inotropes (p. ex., de dobutamine) en ambulatoire ont été essayées, mais elles ont augmenté la mortalité et ne sont pas recommandées. Cependant, des perfusions continues ambulatoires d'inotropes telles que la dobutamine ou la milrinone peuvent être utilisées à des fins palliatives en cas d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite sévère.

Le vericiguat est un stimulateur oral soluble de la guanylate cyclase qui augmente la voie de la guanosine monophosphate cyclique (GMP) et sensibilise la guanylate cyclase soluble à l'oxyde nitrique endogène, ce qui entraîne une vasodilatation pulmonaire. Un essai clinique chez des patients présentant une insuffisance cardiaque chronique symptomatique avec fraction d'éjection réduite avec des signes d'aggravation de l'insuffisance cardiaque a démontré une réduction de la mortalité cardiovasculaire ou des hospitalisations pour insuffisance cardiaque chez des patients randomisés ayant reçu du vericiguat (12). Le vericiguat peut donc être une option pour améliorer l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite chez les patients qui présentent une aggravation des symptômes d'insuffisance cardiaque.

Références pour le traitement médicamenteux

  1. 1. Pitt B, Pfeffer MA, Assmann SF, et al: Spironolactone for heart failure with preserved ejection fraction. N Engl J Med 370:1383–1392, 2014. doi: 10.1056/NEJMoa1313731

  2. 2. Cleland JG, Tendera M, Adamus J, et al: The perindopril in elderly people with chronic heart failure (PEP-CHF) study. Eur Heart J 27:2338–2345, 2006. doi: 10.1093/eurheartj/ehl250

  3. 3. Yusuf S, Pfeffer MA, Swedberg K, et al: Effects of candesartan in patients with chronic heart failure and preserved left-ventricular ejection fraction: the CHARM-Preserved Trial. Lancet 362:777, 2003. doi: 10.1016/S0140-6736(03)14285-7

  4. 4. Massie BM, Carson PE, McMurray JJ, et al: Irbesartan in patients with heart failure and preserved ejection fraction. N Engl J Med 359:2456–2467, 2008. doi: 10.1056/NEJMoa0805450

  5. 5. McMurray JJ, Packer M, Desai AS, et al: Angiotensin-neprilysin inhibition versus enalapril in heart failure. N Engl J Med 371:993–1004, 2014. doi: 10.1056/NEJMoa1409077

  6. 6. Solomon SD, McMurray JJ, Anand IS, et al: Angiotensin-neprilysin inhibition in heart failure with preserved ejection fraction. N Engl J Med 381:1609–1620, 2019. doi: 10.1056/NEJMoa1908655

  7. 7. McMurray JJV, Jackson AM, LAM CSP, et al: Effects of sacubitril-valsartan Versus valsartan in women compared with men with heart failure and preserved ejection fraction: Insights From PARAGON-HF. Circulation 41(5):338–351, 2020. doi: 10.1161/CIRCULATIONAHA.119.044491

  8. 8. Swedberg K, Komajda M, Bohm M, et al: Ivabradine and outcomes in chronic heart failure (SHIFT): a randomised placebo-controlled study. Lancet 376(9744):875–885, 2010. doi: 10.1016/S0140-6736(10)61198-1

  9. 9. McMurray JJV, Solomon SD, Inzucchi SE, et al: Dapagliflozin in patients with heart failure and reduced ejection fraction. N Engl J Med 381(21):1995–2008, 2019. doi: 10.1056/NEJMoa1911303

  10. 10. Anker SD, Butler J, Filippatos G, et al: Empagliflozin in heart failure with a preserved ejection fraction. N Engl J Med 385(16):1451-1461, 2021. doi: 10.1056/NEJMoa2107038. Epub 2021 Aug 27. PMID: 34449189.

  11. 11. Redfield M, Anstrom KJ, Levine JA, et al: Isosorbide mononitrate in heart failure with preserved ejection fraction. N Engl J Med 373:2314–2324, 2015. doi: 10.1056/NEJMoa1510774

  12. 12. Armstrong PW, Pieske B, Anstrom KJ, et al: Vericiguat in patients with heart failure and reduced ejection fraction. N Engl J Med 382(20):1883–1893, 2020. doi: 10.1056/NEJMoa1915928

Plus d'information

Ce qui suit sont quelques-unes des principales lignes directrices en anglais sur l'insuffisance cardiaque qui peuvent être utiles. S'il vous plaît, notez que LE MANUEL n'est pas responsable du contenu de ces ressources.

  1. McDonagh TA, Metra M, Adamo M, et al: 2021 ESC Guidelines for the diagnosis and treatment of acute and chronic heart failure: Developed by the Task Force for the diagnosis and treatment of acute and chronic heart failure of the European Society of Cardiology (ESC) with the special contribution of the Heart Failure Association (HFA) of the ESC. Eur Heart J 42(36):3599-3726, 2021. doi: 10.1093/eurheartj/ehab368

  2. Heidenreich PA, Bozkurt B, Aguilar D, et al: 2022 AHA/ACC/HFSA Guideline for the Management of Heart Failure: A report of the American College of Cardiology/American Heart Association Joint Committee on Clinical Practice Guidelines. Circulation 145:e876–e894, 2022, doi: 10.1161/CIR.0000000000001062

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