Le pyoderma gangrenosum est une nécrose cutanée chronique, neutrophile et progressive d'étiologie inconnue souvent associée à une maladie systémique et parfois une blessure cutanée. Le diagnostic est clinique. Le traitement comprend le traitement des plaies et, en fonction de la gravité, des médicaments anti-inflammatoires ou des immunosuppresseurs.
Étiologie du pyoderma gangrenosum
L'étiologie du pyoderma gangrenosum est inconnue, mais elle peut être associée à diverses maladies systémiques, dont les maladies inflammatoires de l'intestin, la polyarthrite rhumatoïde, les cancers et troubles hématologiques (p. ex., gammapathie monoclonale de signification indéterminée, syndrome myélodysplasique, polyglobulie essentielle). On suppose qu'elle est médiée par une réponse immunitaire anormale.
La plupart des patients sont âgés de ≥ 55 ans (1).
Le pyoderma gangrenosum peut se manifester dans différents sous-types.
Référence pour l'étiologie
1. Xu A, Balgobind A, Strunk A, Garg A, Alloo A. Prevalence estimates for pyoderma gangrenosum in the United States: An age- and sex-adjusted population analysis. J Am Acad Dermatol. 2020;83(2):425-429. doi:10.1016/j.jaad.2019.08.001
Physiopathologie du pyoderma gangrenosum
La physiopathologie du pyoderma gangrenosum est mal comprise mais pourrait impliquer des problèmes de chimiotaxie des neutrophiles. L'interleukine-8 (IL-8) est surexprimée dans les lésions.
Les ulcérations de pyoderma gangrenosum peuvent survenir après un traumatisme ou une lésion cutanée chez environ 30% des patients; ce processus est appelé pathergie (1)
Référence pour la physiopathologie
1. Binus AM, Qureshi AA, Li VW, Winterfield LS. Pyoderma gangrenosum: a retrospective review of patient characteristics, comorbidities and therapy in 103 patients. Br J Dermatol. 2011;165(6):1244-1250. doi:10.1111/j.1365-2133.2011.10565.x
Symptomatologie du pyoderma gangrenosum
Le plus souvent, le pyoderma gangrenosum débute comme une papule érythémateuse inflammée, une pustule ou un nodule. La lésion, qui peut ressembler à un furoncle ou à une morsure d'arthropode à ce stade, puis s'ulcère et s'étend rapidement, développe une base nécrotique tuméfiée et un bord surélevé de foncé à violacé. Des bords creusés (c'est-à-dire, perte des tissus de support sous-jacents) sont fréquents, sinon pathognomoniques. Les ulcérations peuvent confluer pour former de plus grands ulcères, souvent avec une cicatrice criblée.
Les symptômes généraux tels que fièvre et sensation de malaise sont fréquents.
La symptomatologie est variable en fonction du sous-type.
Sous-type ulcéreux (classique)
Dans ce sous-type le plus fréquent, les ulcères se forment comme décrit ci-dessus, le plus souvent sur les membres inférieurs ou le tronc, en particulier les fesses et le périnée.
Photo courtoisie de Karen McKoy, MD.
Sous-type bulleux (atypique)
Ce sous-type moins fréquent se développe souvent chez le patient présentant des troubles hématologiques. Les lésions commencent habituellement comme des bulles qui s'érodent, et deviennent des ulcères superficiels. Les bras et le visage sont le plus souvent impliqués.
Sous-type pustuleux
Ce sous-type tend à se développer au cours des exacerbations de la maladie intestinale inflammatoire. Des pustules douloureuses se développent, entourées par un érythème. Les arthralgies sont fréquentes.
Sous-type végétatif (pyodermite granulomateuse superficielle)
Dans ce sous-type, une seule plaque, indolente, légèrement douloureuse ou un ulcère superficiel se développe, le plus souvent sur la tête ou le cou. Le bord n'est pas creusé (c'est-à-dire, avec des tissus surplombants) et la base n'est pas nécrotique.
Autres sous-types
Le pyoderma gangrenosum peut aussi se développer au niveau d'autres sites, tels qu'autour d'une stomie chez les patients qui ont une maladie intestinale inflammatoire (pyoderma gangrenosum péristomial), au niveau des organes génitaux (pyoderma gangrenosum génital), ou au niveau de sites autres que la peau, tels que les os, la cornée, le système nerveux central, le cœur, les intestins, le foie, les poumons ou le muscle (pyoderma gangrenosum extracutané).
Diagnostic du pyoderma gangrenosum
Bilan clinique
Le diagnostic de pyoderma gangrenosum est clinique et est un diagnostic d'exclusion, après que d'autres causes d'ulcérations auront été écartées. Une expansion de l'ulcération après un débridement chirurgical suggère fortement un pyoderma gangrenosum.
Des biopsies de lésions ne sont souvent pas de nature à poser le diagnostic, mais peuvent aider; de nombreuses biopsies effectuées sur la bordure active montrent une vascularite avec des neutrophiles et de la fibrine dans les vaisseaux superficiels.
Les patients qui ont pyoderma gangrenosum bulleux (atypique) doivent être surveillés par des bilans cliniques périodiques et des NFS à la recherche du développement d'un trouble hématologique.
Traitement du pyoderma gangrenosum
Soins de la plaie
Corticostéroïdes
Inhibiteurs du Tumor necrosis factor (TNF)-alpha
Parfois, d'autres médicaments anti-inflammatoires ou immunosuppresseurs
Éviter les débridements chirurgicaux
La cicatrisation des plaies peut être promue par des pansements occlusifs retenant l'humidité pour des plaques moins exsudatives et des pansements absorbants pour des plaques très exsudatives. Des pansements biologiques et d'autres pansements spécialisés peuvent être nécessaires dans les cas réfractaires. Les pansements humides à secs doivent être évités.
Le traitement topique par des corticostéroïdes à haute puissance ou le tacrolimus peut être utile en cas de lésions superficielles et précoces.
En cas de manifestations plus graves, la prednisone 60 à 80 mg par voie orale 1 fois/jour est un traitement de première ligne fréquent. Les inhibiteurs de TNF-alpha (p. ex., infliximab, adalimumab, étanercept) sont efficaces, particulièrement chez les patients qui ont une maladie intestinale inflammatoire. La cyclosporine 3 mg/kg par voie orale 1 fois/jour est aussi très efficace, en particulier dans la maladie rapidement évolutive. La dapsone, l'azathioprine, le cyclophosphamide, le méthotrexate, la clofazimine, la thalidomide et le mycophénolate mofétil ont également été utilisés avec succès. Des antimicrobiens tels que la minocycline ont également été utilisés dans le pyoderma gangrenosum végétatif (superficiel).
Les traitements chirurgicaux sont à éviter en raison du risque d'extension de la plaie (1).
Référence pour le traitement
1. Alavi A, French LE, Davis MD, et al: Pyoderma gangrenosum: An update on pathophysiology, diagnosis and treatment. Am J Clin Dermatol 18(3):355–372, 2017. doi: 10.1007/s40257-017-0251-7
Points clés
Le pyoderma gangrenosum est souvent associé à un trouble systémique et est probablement à médiation immunitaire.
Il existe plusieurs sous-types; le sous-type ulcéreux (c'est-à-dire, à base nécrotique et des bords soulevés violacés avec bords creusés [c'est-à-dire, avec des tissus surplombants] sur un membre inférieur, la fesse, ou le périnée) est le plus courant.
Diagnostiquer le pyoderma gangrenosum cliniquement.
Optimiser les soins des plaies et éviter le débridement chirurgical.
Utiliser des corticostéroïdes topiques puissants ou du tacrolimus pour le traitement des lésions précoces et utiliser les corticostéroïdes systémiques, des inhibiteurs du TNF (Tumor Necrosis Factor)-alpha, ou d'autres anti-inflammatoires ou immunosuppresseurs pour traiter des manifestations plus graves.