Leucémie myéloïde aiguë (LMA)

(Leucémie myéloïde aiguë)

ParAshkan Emadi, MD, PhD, West Virginia University School of Medicine, Robert C. Byrd Health Sciences Center;
Jennie York Law, MD, University of Maryland, School of Medicine
Vérifié/Révisé oct. 2023
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Dans la leucémie myéloïde aiguë, la transformation maligne et la prolifération incontrôlée d'une cellule progénitrice hématopoïétique conduit à l'infiltration de la moelle normale par des cellules malignes leucémiques et leur passage potentiel en nombre élevé dans le sang périphérique. Les symptômes comprennent une asthénie, une pâleur, des ecchymoses et des hémorragies, une fièvre, ou une infection; des symptômes liés à l’infiltration leucémique extramédullaire sont présents dans environ 5% des cas (souvent des manifestations cutanées). L'examen du frottis sanguin et de la moelle osseuse confirme le diagnostic. Le traitement comprend une chimiothérapie d'induction pour obtenir une rémission complète et un traitement de consolidation (avec ou sans greffe de cellules-souches hématopoïétiques) pour prévenir les rechutes.

(Voir aussi Revue générale des leucémies.)

L'American Cancer Society estime qu'aux États-Unis en 2023 il y aura environ 20 000 nouveaux cas de leucémie myéloïde aiguë (LMA) et environ 11 300 décès, presque tous chez l'adulte. La leucémie myéloïde aiguë est légèrement plus fréquente chez les hommes que chez les femmes, mais le risque moyen au cours de la vie dans les deux sexes est d'environ 0,5% (1 Américain sur 200).

La leucémie myéloïde aiguë représente environ 25% des leucémies infantiles, et se développe souvent en bas âge. Cependant, l’incidence de la leucémie myéloïde aiguë (LMA) augmente avec l’âge; c’est la forme la plus fréquente de leucémie aiguë chez l’adulte, avec une médiane d’âge autour de 68 ans. La leucémie myéloïde aiguë (LMA) peut aussi être secondaire à une chimiothérapie ou à une radiothérapie pour un autre type de cancer. La leucémie myéloïde aiguë (LMA) secondaire est difficile à traiter par la chimiothérapie seule.

Physiopathologie de la leucémie myéloïde aiguë

De même que la leucémie lymphoblastique aiguë, la leucémie myéloïde aiguë est causée par une série d’aberrations génétiques acquises. La transformation maligne se produit habituellement au niveau d'une cellule-souche pluripotente ou d'un progéniteur qui a des capacités d'autorenouvellement plus limitées. Une prolifération anormale, une expansion clonale et une diminution de l'apoptose (mort cellulaire programmée) conduisent à une diminution des éléments sanguins normaux et/ou au passage éventuel des cellules malignes dans le sang.

Classification de la leucémie myéloïde aiguë

La leucémie myéloïde aiguë comprend un certain nombre de sous-types et de néoplasies précurseurs qui se distinguent les uns des autres par leur morphologie, leur immunophénotype, leur cytochimie et leurs anomalies génétiques (voir aussi la Classification of myeloid neoplasms 2016 de l'OMS) qui tous ont des implications importantes pour le pronostic et le traitement. Sept classes sont décrites dans la classification de l’OMS, dont les suivantes

  • Leucémie myéloïde aiguë avec anomalies génétiques récurrentes

  • Leucémie myéloïde aiguë avec modifications myélodysplasiques (AML-MRC)

  • Leucémie myéloïde aiguë liée au traitement (t-AML ou t-LMA)

  • Leucémie myéloïde aiguë, non autrement spécifiée (not otherwise specified, NOS)

  • Sarcome myéloïde

  • Proliférations myéloïdes liées au syndrome de Down

  • Néoplasie des cellules blastiques dendritiques plasmocytoïdes

Les critères morphologiques de l'ancien système de classification Franco-Américano-Britannique (FAB) sont utilisés pour les sous-types non spécifiés par ailleurs.

La leucémie promyélocytaire aiguë est un sous-type de leucémie myéloïde aiguë qui est due à des anomalies génétiques récurrentes. La leucémie promyélocytaire aiguë est un sous-type particulier, qui représente 10 à 15% des leucémies myéloïdes aiguës, touchant une classe d’âge plutôt jeune (âge médian 31 ans), avec une incidence plus élevée dans certaines populations (Hispaniques). Les patients présentant fréquemment un trouble de la coagulation (p. ex., coagulation intravasculaire disséminée [CIVD]).

La leucémie myéloïde aiguë liée au traitement (t-leucémie myéloïde aiguë) est un sous-type de leucémie myéloïde aiguë causé par un traitement antérieur par certains médicaments antinéoplasiques (p. ex., agents alkylants, hydroxyurée et inhibiteurs de la topoisomérase II). La plupart des t-leucémies myéloïdes aiguës apparaissent 3 à 10 ans après le traitement initial, avec une latence plus longue pour les agents alkylants et l'hydroxyurée (latence moyenne de 5 à 7 ans) que pour les inhibiteurs de la topoisomérase II (latence moyenne de 6 mois à 3 ans). Les agents alkylants provoquent des délétions et des translocations chromosomiques non équilibrées. L'hydroxyurée provoque une del(17)p et inhibe également l'activation de TP53. Les inhibiteurs de la topoisomérase II entraînent des translocations chromosomiques équilibrées.

Le sarcome myéloïde est caractérisé par une infiltration myéloblastique extramédullaire de la peau (leucémie cutanée), de la gencive et d'autres muqueuses.

Symptomatologie de la leucémie myéloïde aiguë

Les symptômes de la leucémie myéloïde aiguë peuvent être présents seulement quelques jours ou semaines avant le diagnostic. Les symptômes de présentation les plus courants sont dus à une hématopoïèse perturbée et aux troubles suivants qui s'ensuivent

  • Anémie

  • Thrombopénie

  • Granulocytopénie

L'anémie peut se manifester par une fatigue, une faiblesse, une pâleur, un malaise, une dyspnée d'effort, une tachycardie et des douleurs thoraciques à l'effort.

Une thrombocytopénie peut provoquer des saignements des muqueuses, des ecchymoses, des pétéchies/purpura, des épistaxis, des saignements des gencives et des saignements menstruels abondants. Les hématuries et les hémorragies gastro-intestinales sont plus rares. Les patients peuvent présenter au début des hémorragies spontanées, notamment des hématomes intracrâniens ou intra-abdominaux.

Une granulocytopénie (neutropénie) peuvent entraîner un risque élevé d’infections, bactériennes, fongiques et virales. Les patients peuvent se présenter avec une fièvre et une infection grave et/ou récurrente. L'étiologie de la fièvre n'est souvent pas retrouvée, bien que la sévérité de la neutropénie puisse être responsable d'une infection bactérienne de développement rapide, pouvant mettre en jeu le pronostic vital.

La leucémie cutanée peut prendre diverses formes, notamment des papules ou des nodules et des plaques; elle peut être érythémateuse, brune, hémorragique ou violacée/gris-bleu.

L'infiltration par des cellules leucémiques d'autres systèmes d'organes est moins fréquente dans les leucémies myéloïdes aiguës que dans les leucémies lymphoblastiques aiguës, cependant:

  • L'infiltration peut augmenter le volume du foie, de la rate et des ganglions lymphatiques.

  • L'infiltration de la moelle osseuse et du périoste peut entraîner des douleurs osseuses et articulaires.

  • L'infiltration méningée peut entraîner des paralysies des nerfs crâniens, des céphalées, des symptômes visuels ou auditifs, une altération de l'état mental et des accidents vasculaires cérébraux ischémiques transitoires.

Diagnostic de la leucémie myéloïde aiguë

  • NFS et frottis de sang périphérique

  • Examen de la moelle osseuse

  • Études cytochimiques, cytogénétiques, immunophénotypiques et en biologie moléculaire

Le diagnostic de leucémie myéloïde aiguë est posé lorsque les blastes myéloïdes représentent ≥ 20% des cellules nucléées de la moelle osseuse ou ≥ 20% des cellules non érythroïdes lorsque la composante érythroïde est > 50% ou quel que soit le pourcentage de blastes en présence d'anomalies cytogénétiques récurrentes [t(8;21), t(15;17), inv(16) ou t(16;16)]. Le diagnostic peut être fait selon les mêmes critères sur du sang périphérique.

Une NFS et un frottis sanguin sont les premiers examens pratiqués; la présence d’une pancytopénie et de blastes périphériques évoque une leucémie aiguë. Le nombre de cellules blastiques sur le frottis sanguin peut avoisiner les 90% du nombre de globules blancs.

L'aplasie médullaire, les infections virales telles que la mononucléose infectieuse et la carence en vitamine B12 et un déficit en folate doivent être évoquées comme diagnostic différentiel devant une pancytopénie sévère. Les réactions leucémoïdes (leucocytose granulocytaire marquée [c'est-à-dire, leucocytes > 50 000/mcL, > 50 × 109/L] produites par la moelle osseuse normale) dans une maladie infectieuse ne se manifestent jamais par un nombre de blastes élevé.

Un examen de la moelle osseuse (aspiration et biopsie à l’aiguille) est systématiquement pratiqué. Les blastes dans la moelle osseuse sont généralement compris entre 25 et 95% en cas de leucémie myéloïde aiguë.

Les études cytochimiques, cytogénétiques, immunophénotypiques et biologiques moléculaires aident à distinguer les blastes des leucémies aiguës lymphoblastiques de ceux des leucémies myéloïdes aiguës ou d'autres pathologies. Les tests histochimiques comprennent la coloration à la myéloperoxydase qui est positive dans les cellules d'origine myéloïde. La cristallisation de granules riches en myéloperoxydase induit la formation de bâtonnets d'Auer (inclusions azurophiles linéaires dans le cytoplasme des blastes), qui sont pathognomoniques de la leucémie myéloïde aiguë. La détection de marqueurs immunophénotypiques spécifiques (p. ex., CD13, CD33, CD34, CD117) est essentielle pour classer les leucémies aiguës.

Les anomalies cytogénétiques couramment observées dans la leucémie myéloïde aiguë comprennent les réarrangements t(15;17), la trisomie 8, t(8;21), inv(16) ou t(16;16) et 11q23.3 (voir tableau Anomalies cytogénétiques fréquentes dans la leucémie myéloïde aiguë).

Tableau
Tableau

Les anomalies cytogénétiques moins fréquentes comprennent les suivantes

  • t(9;11)(p22.3;q23.3)/MLLT3-KMT2A

  • t(1;22)(p13.3;q13.1)/RBM15-MKL1

  • t(6;9)(p23;q34.1)/DEK-NUP214

  • inv(3)(q21.3q26.2)

Les autres signes biologiques peuvent comprendre une hyperuricémie, une hyperphosphatémie, une hyperkaliémie, une hypocalcémie et une élévation de la déshydrogénase lactique. Ces signes indiquent un syndrome de lyse tumorale. Des transaminases hépatiques sériques et/ou une créatinine sériques élevées et une pseudohypoglycémie peuvent également être présentes.

Une TDM de la tête est effectuée chez les patients présentant des symptômes du système nerveux central. Une échographie cardiaque ou une scintigraphie MUGA est généralement réalisée pour évaluer la fonction cardiaque avant l'administration d'anthracyclines car elles sont cardiotoxiques.

Traitement de la leucémie myéloïde aiguë

  • Dans le cas des patients en bon état général: chimiothérapie (induction et consolidation) avec ou sans greffe allogénique des cellules souches hématopoïétiques

  • Dans le cas des patients médicalement fragiles: thérapies moins intensives

  • Pour tous: soins de soutien

Le traitement de la leucémie myéloïde aiguë dépend de l'état général du patient. Les patients en bon état général tendent à être plus jeunes et à présenter des anomalies cytogénétiques à risque moindre, un meilleur statut fonctionnel et moins de comorbidités que les patients médicalement fragiles.

Le traitement de la leucémie myéloïde aiguë étant complexe et évolutif, il est préférable qu'il soit pratiqué dans le centre le plus spécialisé disponible, en particulier pendant les phases critiques (p. ex., l'induction de la rémission); les essais cliniques sont le premier choix lorsqu'ils sont disponibles.

Patients médicalement en forme qui ont une leucémie myéloïde aiguë

Chez les patients en bon état général, le traitement initial consiste en une chimiothérapie d'induction visant à induire une rémission complète. Les patients en rémission reçoivent ensuite un traitement de consolidation pouvant comprendre une greffe allogénique de cellules souches hématopoïétiques.

La rémission complète est définie comme < 5% de blastes dans la moelle osseuse, un nombre absolu de neutrophiles > 1000/mcL (> 1 × 109/L), un nombre de plaquettes > 100 000/mcL (> 100 × 109/L) et l'absence de besoin de transfusion sanguine.

Le traitement d'induction standard (connu sous le nom de 7+3) comprend l'association de cytarabine en perfusion IV continue pendant 7 j et de daunorubicine ou d'idarubicine administrée par voie IV pendant 3 jours au cours de la même période. Le traitement se traduit généralement par une aplasie profonde, avec des risques d’infections et d’hémorragies. Il y a une latence importante avant la guérison de la moelle. Pendant cette période, des mesures préventives et des soins de support sont vitaux.

Les taux de rémission complète sous 7+3 sont d'environ 70 à 85% (génétique favorable, voir Pronostic de la leucémie myéloïde aiguë en fonction de certaines anomalies cytogénétiques fréquentes), de 60 à 75% (génétique intermédiaire) et de 25 à 40% (génétique défavorable); les taux de rémission complète dépendent également des facteurs de risque spécifiques du patient et d’autres facteurs (p. ex., leucémie myéloïde aiguë versus de novo). Cependant, la plupart des patients chez qui on obtient une rémission complète sous 7+3 (ou un autre protocole d'induction conventionnel) rechutent finalement.

Une ré-induction est généralement recommandée en cas de leucémie résiduelle au jour 14, bien qu'il n'y ait aucune preuve de haute qualité que cela améliore les résultats. La leucémie résiduelle est définie de manière variable comme des blastes de la moelle osseuse > 10% avec une cellularité de la moelle osseuse > 20%. Les divers protocoles de réinduction recommandés comprennent différentes doses de cytarabine. Certains comprennent des anthracyclines avec ou sans 3e agent.

Plusieurs médicaments peuvent être utilisés avec ou à la place de la chimiothérapie traditionnelle 7+3. L’ajout de midostaurin, un inhibiteur de kinase, à la chimiothérapie semble prolonger la survie de certains patients (p. ex., les adultes de < 60 ans chez qui on a récemment diagnostiqué une leucémie myéloïde aiguë à FLT3 muté) (1). Le gemtuzumab ozogamicin (un conjugué anticorps-médicament dirigé contre CD33) peut être associé à une chimiothérapie chez les patients présentant une leucémie myéloïde aiguë positive pour CD33 nouvellement diagnostiquée. Le gemtuzumab ozogamicin est également parfois utilisé en monothérapie pour l'induction et la consolidation.

Une phase de consolidation suit la rémission dans de nombreux régimes. Ceci peut être réalisé avec les mêmes, ou d'autres drogues que celles utilisées lors de l'induction. Les protocoles thérapeutiques utilisant de fortes doses de cytarabine peuvent prolonger la durée de la rémission complète, particulièrement en consolidation chez les patients de < 60 ans. Dans la leucémie myéloïde aiguë cytogénétique non-leucémie promyélocytaire aiguë favorable en première rémission complète, la consolidation par de la cytarabine à forte dose est considérée comme un traitement standard post-induction.

Le traitement d'entretien par une formulation orale d'azacitidine a été associé à une survie globale et à une survie sans rechute significativement plus longue que le placebo chez les patients de > 55 ans qui étaient en première rémission après une chimiothérapie intensive et qui n'étaient pas candidats à la transplantation de cellules souches hématopoïétiques (2).

Une association liposomale de daunorubicine et de cytarabine est disponible pour le traitement de la leucémie myéloïde aiguë de l'adulte nouvellement diagnostiquée (t-AML) ou de la leucémie myéloïde aiguë associée à des modifications myélodysplasiques (AML-MRC). Cette association a été démontrée supérieure en termes de survie globale par rapport à la cytarabine plus daunorubicine standard (protocole 7+3) chez les patients de 60 à 75 ans chez qui a récemment été posé un diagnostic de t-leucémie myéloïde aiguë ou de leucémie myéloïde aiguë avec anomalies myélodysplasiques (AML-MRC, acute myeloid leukemia [AML] with myelodysplasia-related changes) (3).

L'allogreffe de cellules souches effectuée au cours de la première rémission complète améliore généralement le pronostic des patients présentant une cytogénétique à risque intermédiaire ou élevé. En règle générale, il faut 6 à 12 semaines pour préparer à une greffe de cellules souches. Il est recommandé de poursuivre la chimiothérapie standard de consolidation à la cytarabine à haute dose en attendant la greffe définitive des cellules souches. Les conditions pouvant rendre les patients inéligibles à une greffe de cellules souches allogéniques sont notamment un état de performance global médiocre et une insuffisance modérée à sévère des fonctions pulmonaire, hépatique, rénale ou cardiaque.

Dans la leucémie aiguë promyélocytaire et certains autres cas de leucémie myéloïde aiguë, une coagulation intravasculaire disséminée (CIVD) peut être présente au diagnostic de la leucémie et s'aggraver lors de l'initiation du traitement, la lyse des cellules leucémiques libérant des substances procoagulantes. Dans la leucémie promyélocytaire aiguë avec translocation t(15;17), l'acide tout-trans-rétinoïque (trétinoïne) corrige la CIVD en 2 à 5 jours; associé à la daunorubicine ou à l'idarubicine, ce traitement peut induire une rémission chez 80 à 90% des patients et permettre une survie à long terme dans 65 à 70% des cas. Le trioxyde d'arsenic est également très efficace dans le traitement des leucémies promyélocytaires aiguës. Le traitement ciblé par la trétinoïne et le trioxyde de diarsenic sans chimiothérapie cytotoxique conventionnelle est très bien toléré et a été extrêmement efficace dans les leucémies promyélocytaires aiguës avec un taux de rémission complète de 100% et un taux de guérison > 90% (4).

Patients médicalement fragiles atteints de leucémie myéloïde aiguë

Chez les patients âgés et fragiles sur le plan médical, le traitement initial est généralement moins intensif.

L'âge médian du diagnostic de leucémie myéloïde aiguë étant de 68 ans, la plupart des patients nouvellement diagnostiqués sont considérés comme étant des personnes âgées. Les patients âgés sont plus susceptibles d’avoir des comorbidités qui limitent leurs options thérapeutiques. Les patients âgés sont également beaucoup plus susceptibles de présenter des anomalies cytogénétiques à haut risque (p. ex., caryotype complexe, monosomie 7), une leucémie myéloïde aiguë secondaire résultant d'un syndrome myélodysplasique ou des néoplasies myéloprolifératives ou une leucémie myéloïde aiguë multirésistantes.

Bien que la chimiothérapie intensive ne soit habituellement pas utilisée chez les patients âgés, elle améliore néanmoins le taux de rémission complète et la survie globale des patients de < 80 ans, en particulier ceux présentant des caryotypes à risque favorable. La rémission complète améliore également la qualité de vie en réduisant le nombre d'hospitalisations, d'infections et de transfusions.

La décitabine et l'azacitidine, des inhibiteurs de l'ADN méthyltransférase, sont des analogues de nucléosides pyrimidiques qui modulent l'ADN en réduisant la méthylation de la région promotrice des gènes suppresseurs de tumeurs. Elles ont amélioré les résultats cliniques des patients âgés atteints de leucémie myéloïde aiguë de novo ainsi que de ceux atteints de s-leucémie myéloïde aiguë (leucémie myéloïde aiguë précédée d'un syndrome myélodysplasique), de t-leucémie myéloïde aiguë (leucémie myéloïde aiguë liée au traitement) et de leucémie myéloïde aiguë hébergeant des mutations de TP53. L'un de ces médicaments peut être administré seul en traitement de première intention à de nombreux patients âgés, en particulier ceux dont l'état fonctionnel/de performance est altéré, à ceux qui ont un dysfonctionnement d'un organe ou selon la biologie de la tumeur (p. ex., caryotype, aberrations moléculaires) qui prédit une réponse médiocre à la chimiothérapie intensive.

Le vénétoclax, un inhibiteur de la protéine anti-apoptotique BCL-2, est utilisé en association avec l'azacitidine, la décitabine ou la cytarabine à faible dose dans le traitement de la leucémie myéloïde aiguë nouvellement diagnostiquée chez les adultes de ≥ 75 ans ou qui ont des comorbidités qui empêchent l'utilisation intensive d'une chimiothérapie d'induction. Dans une étude de phase 3, les patients non précédemment traités qui présentaient une leucémie myéloïde aiguë et qui n'étaient pas admissibles au traitement d'induction standard ont été randomisés pour recevoir de l'azacitidine plus du vénétoclax ou de l'azacitidine plus un placebo. L'incidence de la rémission était plus élevée et la survie globale était plus longue chez les patients qui ont reçu de l'azacitidine plus du vénétoclax que chez ceux qui ont reçu l'azacitidine seule (5).

Le glasdegib, un inhibiteur de la voie hedgehog, peut également être utilisé, en association avec la cytarabine à faible dose, dans le traitement de la leucémie myéloïde aiguë nouvellement diagnostiquée chez les patients de ≥ 75 ans ou qui ont des comorbidités qui empêchent l'utilisation de la chimiothérapie d'induction intensive.

L'ivosidénib, un inhibiteur de l'isocitrate déshydrogénase-1 (IDH1), est également utilisé en cas de diagnostic récent de leucémie myéloïde aiguë IDH1 mutante de ≥ 75 ans ou qui ont des comorbidités qui empêchent la chimiothérapie d'induction intensive.

Après le traitement d'induction et si leur état de performance est approprié, les patients âgés peuvent subir une allogreffe de cellules souches hématopoïétiques. La greffe de cellules souches hématopoïétiques allogène prolonge la survie chez les patients âgés. Si les patients ne sont pas candidats à un protocole d'intensité maximale, un protocole d'intensité réduite (non myéloablative) peut être utilisé. Les patients âgés et les patients fragiles que l'on ne transplante pas reçoivent généralement une chimiothérapie de consolidation (p. ex., par la cytarabine ou une association de cytarabine et d'anthracycline à des doses plus faibles que celles utilisées pour l'induction).

Leucémie myéloïde aiguë en rechute ou résistante

Les patients qui n'ont pas répondu (qui sont résistants) au traitement et les patients qui ont rechuté ont généralement un mauvais pronostic. Une deuxième rémission peut être obtenue chez 30% à 70% des patients qui ont rechuté après une première rémission. Ces secondes rémissions sont plus faciles à obtenir chez les patients présentant une rémission initiale > 1 an et/ou une cytogénétique favorable et leur durée est généralement plus courte que celle des premières rémissions.

Les patients en rechute de leucémie myéloïde aiguë ou à maladie résistante peuvent être candidats à la greffe allogénique de cellules souches précédée d'une chimiothérapie de réinduction de récupération. De nombreux régimes chimiothérapeutiques de rescue comprennent diverses doses de cytarabine associées à des médicaments tels que l'idarubicine, la daunorubicine, la mitoxantrone, l'étoposide, des antimétabolites (p. ex., la cladribine, la clofarabine, la fludarabine) et à l'asparaginase. Des schémas thérapeutiques contenant de la décitabine et de l'azacitidine sont parfois utilisés.

La perfusion de lymphocytes de donneur est une autre option de traitement de la leucémie myéloïde aiguë en rechute ou résistante si la greffe allogénique initiale de cellules souches a échoué. D'autres traitements innovants sont l'énasidénib, un inhibiteur de l'isocitrate déshydrogénase-2 (IDH2) ou l'ivosidenib, un inhibiteur de l'isocitrate déshydrogénase-1 (IDH1), qui peuvent être utiles dans les leucémies myéloïdes aiguës de l'adulte en rechute ou réfractaires qui ont une mutation d'IDH2 ou d'IDH1 et le gemtuzumab ozogamicine qui peut être utilisé en monothérapie pour les leucémies myéloïdes aiguës en rechute ou réfractaires.

Le gilteritinib est un inhibiteur de kinase utilisé dans le traitement des patients adultes atteints de leucémie myéloïde aiguë en rechute ou réfractaire porteurs d'une mutation de FLT3. Dans l'étude de phase 3, les patients randomisés pour recevoir le gilteritinib avaient une survie significativement plus longue que les patients traités par chimiothérapie (6).

Des CAR-T ciblant CD123 ou CD33 et des conjugués anticorps-médicament ciblant CD33 ont également été utilisés dans des essais cliniques (7).

Soins de support

Les soins de support sont similaires pour tous les types de leucémies et peuvent comprendre

  • Transfusions

  • Antimicrobiens

  • Hydratation et alcalinisation des urines

  • L'aide psychologique

Des transfusions de globules rouges et de plaquettes sont administrées selon les besoins en cas d'anémie ou de saignements. Une transfusion de plaquettes prophylactique est effectuée lorsque les plaquettes tombent à < 10 000/mcL (< 10 × 109/L). L'anémie (hémoglobine < 7 ou 8 g/dL [< 70 ou 80 g/L]) est traitée par des transfusions de concentrés globulaires. Les transfusions de granulocytes ne sont pas utilisées de manière routinière.

Les antimicrobiens sont souvent nécessaires en prophylaxie et traitement parce que le patient est immunodéprimé; chez ces patients, les infections peuvent évoluer rapidement avec peu de prodromes cliniques. Après avoir effectué les examens et les cultures appropriés, le patient fébrile qui a un nombre de neutrophiles < 500/mcL (< 0,5 × 109/L) doit recevoir un traitement antibiotique bactéricide à large spectre couvrant les bactéries Gram positives et négatives (p. ex., ceftazidime, pipéracilline/tazobactam, méropénème). Les infections mycosiques, en particulier les pneumonies, sont difficiles à diagnostiquer; c'est pourquoi, la TDM thoracique pour détecter la pneumonie fongique doit être effectué tôt (c'est-à-dire dans les 72 heures suivant la présentation d'une fièvre neutropénique, selon le degré de suspicion). Les traitements antifongiques empiriques doivent être administrés si la thérapie antibactérienne n'est pas efficace dans les 72 heures. En cas de pneumopathie réfractaire au traitement antibiotique habituel, on suspectera une infection à Pneumocystis jirovecii ou une infection virale qui seront confirmées par une bronchoscopie avec lavage bronchoalvéolaire et traitées de façon appropriée. Le posaconazole, un antifongique triazolé de deuxième génération, est indiqué en prophylaxie primaire chez les patients âgés de > 13 ans présentant un risque élevé de développer une infection à Aspergillus ou à Candida en raison d'une immunosuppression. La prophylaxie par l’acyclovir ou le valacyclovir est généralement recommandée chez tous les patients.

L'hydratation et l'allopurinol ou la rasburicase sont utilisés pour traiter l'hyperuricémie, l'hyperphosphatémie, l'hypocalcémie et l'hyperkaliémie (c'est-à-dire, le syndrome de lyse tumorale) provoqué par la lyse rapide des cellules leucémiques au cours du traitement initial (en particulier dans les leucémies aiguës lymphoblastiques).

Une aide psychologique permettra au patient et à sa famille de supporter le choc de la maladie et les difficultés occasionnées par le traitement dans cette affection mettant potentiellement en jeu le pronostic vital.

Références pour le traitement

  1. 1. Stone RM, Mandrekar SJ, Sanford BL, et al: Midostaurin plus chemotherapy for acute myeloid leukemia with a FLT3 mutation. N Engl J Med 377:454–464, 2017.

  2. 2. Wei AH, Dohner H, Pocock C, et al: Oral azacitidine maintenance therapy for acute myeloid leukemia in first remission. N Engl J Med 383:2526–2537, 2020. doi: 10.1056/NEJMoa2004444

  3. 3. Lancet JE, Uy GL, Cortes JE, et al: CPX-351 (cytarabine and daunorubicin) liposome for injection versus conventional cytarabine plus daunorubicin in older patients with newly diagnosed secondary acute myeloid leukemia. J Clin Oncol 36:2684–2692, 2018.

  4. 4. Lo-Coco F, Avvisati G, Vignetti M, et al: Retinoic acid and arsenic trioxide for acute promyelocytic leukemia. N Engl J Med 369:111–121, 2013.

  5. 5. DiNardo CD, Jonas BA, Pullarkat V, et al: Azacitidine and venetoclax in previously untreated acute myeloid leukemia. N Engl J Med 383:617–629, 2020. doi: 10.1056/NEJMoa2012971

  6. 6. Perl AE, Martinelli G, Cortes JE, et al: Gilteritinib or chemotherapy for relapsed or refractory FLT3-mutated AML. N Engl J Med 381:1728–1740. 2019.

  7. 7. Pelosi E, Castelli G, Testa U: CD123 a Therapeutic Target for Acute Myeloid Leukemia and Blastic Plasmocytoid Dendritic Neoplasm. Int J Mol Sci 24(3):2718, 2023. doi:10.3390/ijms24032718

Pronostic de la leucémie myéloïde aiguë

Les taux de rémission varient entre 50 et 85% (1). La survie à long terme sans rechute concerne de 20 à 40% des sujets mais est de 40 à 50% chez le sujet jeune traité par chimiothérapie intensive ou greffe de cellules-souches.

Les facteurs pronostiques sont essentiels pour le choix du protocole thérapeutique et son intensité; en présence de facteurs de mauvais pronostic, un traitement intensif suivi d’une greffe allogénique de cellules souches est habituellement administré. Chez ces patients, on estime que les bénéfices potentiels d'un traitement intensif justifient l'augmentation de la toxicité du traitement.

Le caryotype des cellules leucémiques est le facteur pronostique le plus important. En fonction des réarrangements chromosomiques spécifiques, trois groupes cliniques ont été identifiés: favorable, intermédiaire et médiocre (voir tableau Pronostic de la leucémie myéloïde aiguë en fonction de certaines anomalies cytogénétiques fréquentes).

Tableau
Tableau

Les anomalies génétiques moléculaires sont aussi importantes dans l'affinage du traitement et du pronostic de la leucémie myéloïde aiguë. Il existe de nombreuses mutations différentes; elles sont classées en groupes en fonction de leur effet sur le pronostic et le traitement. Les patients atteints de leucémie myéloïde aiguë ont en moyenne 5 mutations géniques récurrentes. Les patients qui ont des mutations de NPM1 ou de CEBPA ont un pronostic plus favorable. Les mutations de FLT3 ont un pronostic plus sombre (y compris chez les patients ayant également une mutation NPM1 par ailleurs favorable).

D'autres facteurs en faveur d'un mauvais pronostic comprennent les points suivants

  • Précédente phase myélodysplasique

  • Leucémie myéloïde aiguë liée au traitement

  • Taux élevé de globules blancs (> environ 50 000/microL [> 50 × 109/L])

Les facteurs pronostiques négatifs spécifiques dépendants du patient comprennent un âge ≥ 65 ans, un statut de performance médiocre et des comorbidités. Les patients âgés sont plus susceptibles de présenter des anomalies cytogénétiques à haut risque (voir tableau Pronostic de la leucémie myéloïde aiguë basé sur certaines anomalies cytogénétiques fréquentes), une leucémie myéloïde aiguë secondaire et une leucémie myéloïde aiguë résistantes à plusieurs médicaments.

La maladie résiduelle minimale est définie comme une proportion < 0,1 à 0,01% (sur la base du test utilisé) de cellules leucémiques dans la moelle osseuse. Dans la leucémie myéloïde aiguë, la maladie résiduelle minimale peut être évaluée par détection par cytométrie en flux multiparamétrique de l'immunophénotype associé à la leucémie ou par a Polymerase Chain Reaction (PCR) spécifique de la mutation. Ces outils sont précis sur le plan pronostique, mais ne sont pas prêts à être utilisés en pratique clinique de routine.

Référence pour le pronostic

  1. 1. Döhner H, Wei AH, Appelbaum FR, et al. Diagnosis and management of AML in adults: 2022 recommendations from an international expert panel on behalf of the ELN. Blood 2022;140(12):1345-1377. doi:10.1182/blood.2022016867

Points clés

  • La leucémie myéloïde aiguë (LMA) est la leucémie aiguë la plus fréquente chez l'adulte.

  • Il existe un certain nombre de sous-types, avec généralement des cellules myéloïdes très immatures.

  • Les anomalies chromosomiques et génétiques moléculaires sont fréquentes ce qui a des implications pronostiques et thérapeutiques.

  • Chez les patients en bonne état général, traiter par une chimiothérapie d'induction et de consolidation suivies d'une greffe allogénique de cellules souches hématopoïétiques (chez les patients présentant des caractéristiques génétiques intermédiaires et défavorables).

  • Chez les patients fragiles, traiter par des schémas thérapeutiques moins intensifs tels que des inhibiteurs de l’ADN méthyltransférase et envisager une greffe allogénique de cellules souches hématopoïétiques.

  • Chez les patients en rechute et/ou résistants, traiter par une chimiothérapie de sauvetage (rescue) suivie d'une greffe allogénique de cellules souches hématopoïétiques, ou utiliser des thérapies ciblées.

Plus d'information

La source d'information suivante en anglais peut être utile. S'il vous plaît, notez que LE MANUEL n'est pas responsable du contenu de cette ressource.

  1. Leukemia and Lymphoma Society: Resources for Healthcare Professionals: Provides information on education programs and conferences and resources for referrals to specialty care

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