Connectivite mixte

ParAlana M. Nevares, MD, The University of Vermont Medical Center
Vérifié/Révisé nov. 2024
Voir l’éducation des patients

La connectivite mixte est un syndrome rare qui se caractérise par les manifestations cliniques superposées du lupus érythémateux disséminé, de la sclérodermie, de la polymyosite/dermatomyosite et de la polyarthrite rhumatoïde et par des taux très élevés d'anticorps antinucléaires circulants dirigés contre un antigène de type ribonucléoprotéine (RNP). Une tuméfaction de la main, un syndrome de Raynaud, des polyarthralgies, une myopathie inflammatoire, une hypomotilité œsophagienne et une maladie pulmonaire interstitielle sont fréquents. Le diagnostic repose sur l'association des signes cliniques, par la présence d'anticorps antiribonucléoprotéines et par l'absence d'anticorps spécifiques d'autres maladies rhumatologiques systémiques. Le traitement varie selon la gravité des maladies et l'atteinte d'organes mais comprend habituellement des corticostéroïdes et également des immunosuppresseurs.

La connectivite mixte est cosmopolite et touche toutes les races avec un pic d'incidence à l'adolescence. Elle est plus fréquemment rapportée chez la femme que chez l'homme (1).

La cause de la connectivite mixte est inconnue. Chez de nombreux patients, la maladie évolue vers une sclérodermie classique ou vers un lupus érythémateux disséminé. Ainsi, il y a absence de consensus parmi certains experts selon lesquels la connectivite mixte doit être considérée comme une maladie distincte.

Référence générale

  1. 1. Gunnarsson R, Molberg O, Gilboe IM, Gran JT; PAHNOR1 Study Group. The prevalence and incidence of mixed connective tissue disease: a national multicentre survey of Norwegian patients. Ann Rheum Dis. 2011;70(6):1047-1051. doi:10.1136/ard.2010.143792

Symptomatologie de la connectivite mixte

Un syndrome de Raynaud (phénomène de Raynaud) peut précéder les autres manifestations. Fréquemment, les premières manifestations ressemblent à celles d'un lupus érythémateux disséminé, d'une sclérodermie, d'une polymyosite ou même d'une polyarthrite rhumatoïde. De nombreux patients, semblent avoir initialement une maladie du tissu conjonctif mixte ou indifférenciée. Les manifestations de la maladie peuvent progresser et s'étendre, et leur expression clinique se modifie avec le temps (1).

La tuméfaction initiale diffuse des mains est typique, mais non universelle. Les signes cutanés comprennent des engelures, des lésions discoïdes et une éruption malaire similaire à celle du lupus érythémateux disséminé. Des lésions diffuses de type sclérodermique et les nécroses ou ulcérations ischémiques de la pulpe des doigts peuvent se développer.

Presque tous les patients ont des polyarthralgies et 75% ont des arthrites. Souvent, l'arthrite n'est pas déformante, mais des érosions et des déformations similaires à la polyarthrite rhumatoïde sont parfois observées (p. ex., déformations en boutonnière et en col-de-cygne).

Une faiblesse musculaire proximale est habituelle, typiquement chez les personnes qui ont des niveaux élevés d'enzymes musculaires (p. ex., creatine kinase [CK]).

Une dysmotilité gastro-intestinale est également rapportée dans la connectivite mixte, comme dans la sclérodermie.

L'atteinte rénale (le plus souvent néphropathie membraneuse) se produit chez environ 25% des patients et est généralement légère; une atteinte sévère, avec une morbidité ou une mortalité, est atypique dans la connectivite mixte.

Les poumons sont affectés dans jusqu'à 75% des cas de connectivite mixte. Les épanchements pleuraux et la pneumopathie interstitielle sont les manifestations pulmonaires les plus fréquentes; l'hypertension artérielle pulmonaire est une cause majeure de décès et est rapportée dans jusqu'à 13% des cas (2).

La péricardite est une caractéristique fréquente. Une myocardite sévère entraînant une insuffisance cardiaque est rare mais peut survenir.

Un syndrome de Sjögren peut se développer.

Références pour la symptomatologie

  1. 1. Ortega-Hernandez OD, Shoenfeld Y. Mixed connective tissue disease: an overview of clinical manifestations, diagnosis and treatment. Best Pract Res Clin Rheumatol. 2012;26(1):61-72. doi:10.1016/j.berh.2012.01.009

  2. 2. Wigley FM, Lima JA, Mayes M, McLain D, Chapin JL, Ward-Able C. The prevalence of undiagnosed pulmonary arterial hypertension in subjects with connective tissue disease at the secondary health care level of community-based rheumatologists (the UNCOVER study). Arthritis Rheum. 2005;52(7):2125-2132. doi:10.1002/art.21131

Diagnostic de la connectivite mixte

  • Dosage d'anticorps antinucléaires (AAN) et d'anticorps contre les antigènes nucléaires extractibles, dont les anticorps contre la ribonucléoprotéine U1, Smith et anti-ADN-double brin

  • Atteinte d'un organe déterminée selon les indications cliniques

Bien que la présentation clinique de la connectivite mixte soit hétérogène, elle doit être suspectée lorsque les patients ont des signes compatibles avec un lupus érythémateux disséminé, une sclérodermie ou une polymyosite. Une minorité significative de patients peut évoluer vers une maladie bien définie telle qu'une sclérodermie, un lupus érythémateux disséminé ou une myopathie inflammatoire quelques années après le diagnostic initial de la connectivite mixte (1).

Les tests des anticorps antinucléaires (AAN) et des anticorps contre la ribonucléoprotéine U1 (RNP) sont effectués en premier. Presque tous les patients ont des titres élevés d'AAN en immunofluorescence indirecte; l'ANA produit un motif moucheté. Les anticorps anti-U1 RNP sont habituellement présents à des taux très élevés. Les anticorps contre la composante Smith (Sm) ribonucléase-résistante de l'antigène nucléaire extractible (anticorps anti-Sm) et contre l'ADN double-brin (négatifs dans la connectivite mixte par définition) sont mesurés pour exclure un lupus érythémateux disséminé. La présence d'anticorps anti-RNP n'est pas suffisante pour poser le diagnostic de connectivite mixte; des signes cliniques typiques sont également nécessaires.

Le facteur rhumatoïde est souvent positif et les titres peuvent être élevés. La vitesse de sédimentation érythrocytaire et les taux de protéine C réactive sont fréquemment élevés.

L'hypertension artérielle pulmonaire doit être évaluée par des épreuves fonctionnelles respiratoires et une échocardiographie, comme en cas de sclérodermie. Une évaluation plus poussée dépend de la symptomatologie, dont les manifestations de myosite, l'atteinte rénale ou l'atteinte pulmonaire.

La créatine kinase, l'IRM, l'électromyographie ou la biopsie musculaire peuvent permettre de confirmer la présence d'une myosite dans le cadre de la connectivite mixte.

Référence pour le diagnostic

  1. 1. Reiseter S, Gunnarsson R, Corander J, et al. Disease evolution in mixed connective tissue disease: results from a long-term nationwide prospective cohort study. Arthritis Res Ther. 2017;19(1):284. Publié le 21 décembre 2017. doi:10.1186/s13075-017-1494-7

Traitement de la connectivite mixte

  • Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ou antipaludéens (p. ex., hydroxychloroquine, chloroquine) en cas de maladie bénigne

  • Corticostéroïdes et autres immunosuppresseurs (p. ex., méthotrexate, azathioprine, mycophénolate mofétil) pour les maladies modérées à sévères

  • Inhibiteurs calciques (p. ex., nifédipine) et inhibiteurs de la phosphodiestérase (p. ex., tadalafil) dans le syndrome de Raynaud

La prise en charge générale et le traitement pharmacologique initial sont extrapolés à partir des approches utilisées pour d'autres maladies rhumatismales systémiques et sont guidés par le phénotype clinique dominant (c'est-à-dire, d'une manière similaire à celle du lupus érythémateux disséminé, de la sclérodermie ou de la myosite) (1).

Les symptômes en cas de forme modérée est souvent contrôlée par les AINS, les antipaludéens (p. ex., hydroxychloroquine, chloroquine) ou, parfois, par des doses très faibles de corticostéroïdes.

La plupart des patients qui ont une maladie modérée ou sévère répondent aux corticostéroïdes, en particulier s'ils sont traités précocement; cependant, l'utilisation de corticostéroïdes doit être minimisée lorsque les signes de sclérodermie sont marqués pour éviter une crise sclérodermique rénale. La plupart des patients qui ont une maladie modérée ou sévère répondent également à d'autres immunosuppresseurs (p. ex., méthotrexate, azathioprine, mycophénolate mofétil).

L'atteinte sévère d'un organe majeur requiert habituellement des doses plus importantes de corticostéroïdes (p. ex., prednisone 1 mg/kg par voie orale 1 fois/jour) ou d'immunodépresseurs. Si les patients développent des signes dominants de myosite ou de sclérodermie, le traitement est le même que pour ces maladies.

Les patients qui ont un syndrome de Raynaud doivent être traités en fonction de leurs symptômes et selon la tolérance de leur pression artérielle par des inhibiteurs calciques (p. ex., la nifédipine) et des inhibiteurs de la phosphodiestérase (p. ex., le tadalafil).

L'athérosclérose doit faire l'objet d'un suivi chez les patients. Les patients sous corticostéroïdes au long cours peuvent recevoir un biphosphonate pour prévenir l'ostéoporose. Si un traitement immunosuppresseur d'association est utilisé, les patients doivent recevoir une prophylaxie contre les infections opportunistes, telles que par Pneumocystis jirovecii (voir prévention de la pneumonie à Pneumocystis jirovecii) et des vaccins contre les infections fréquentes (p. ex., pneumonie streptococcique, grippe, COVID-19).

Certains experts encouragent le dépistage périodique de l'hypertension pulmonaire par des épreuves fonctionnelles respiratoires et/ou une échocardiographie tous les 1 à 2 ans, en fonction des symptômes.

Référence pour le traitement

  1. 1. Gunnarsson R, Hetlevik SO, Lilleby V, Molberg Ø. Mixed connective tissue disease. Best Pract Res Clin Rheumatol. 2016; 30 (1): 95-111. doi:10.1016/j.berh.2016.03.002

Pronostic de la connectivite mixte

La survie globale à 10 ans est d'environ 96% (1) mais le pronostic dépend largement des manifestations prédominantes. Les patients qui présentent des caractéristiques de sclérodermie et de polymyosite ont un plus mauvais pronostic. Les patients ont des risques d'athérosclérose accrus.

Les causes de décès sont l'hypertension artérielle pulmonaire, l'insuffisance rénale, l'infarctus du myocarde, la perforation colique, les infections disséminées et les hémorragies cérébrales.

Certains patients connaissent des rémissions pendant de nombreuses années sans traitement.

Référence pour le pronostic

  1. 1. Hajas A, Szodoray P, Nakken B, et al. Clinical course, prognosis, and causes of death in mixed connective tissue disease. J Rheumatol. 2013;40(7):1134-1142. doi:10.3899/jrheum.121272

Points clés

  • La connectivite mixte est caractérisée par des signes de lupus érythémateux disséminé, de sclérodermie et/ou de polymyosite.

  • Des AAN et des anticorps contre U1 RNP sont présents et les anticorps anti-Sm et anti-ADN sont absents mais la présence isolée d'anticorps anti-RNP n'est pas suffisante pour poser le diagnostic.

  • Anticiper une hypertension artérielle pulmonaire.

  • Traiter une maladie bénigne par les AINS ou les antipaludéens et une maladie plus grave par des corticostéroïdes et d'autres immunosuppresseurs.

quizzes_lightbulb_red
TESTEZ VOS CONNAISSANCESTake a Quiz!
Téléchargez l’application Manuel MSD. ANDROID iOS
Téléchargez l’application Manuel MSD. ANDROID iOS
Téléchargez l’application Manuel MSD. ANDROID iOS