La trichinose est une infection à Trichinella spiralis ou des espèces Trichinella apparentées. Les symptômes comprennent l'irritation initiale du tube digestif, l'œdème périorbitaire, des douleurs musculaires, une fièvre et l'éosinophilie. Le diagnostic est clinique avec confirmation ultérieure par des tests sérologiques. Le diagnostic peut se faire par biopsie musculaire, ce qui est rarement nécessaire. Le traitement repose sur le mébendazole ou l'albendazole et aussi sur la prednisone si les symptômes sont sévères.
(Voir aussi Prise en charge des infections parasitaires.)
La trichinose est cosmopolite. Outre l'agent classique, Trichinella spiralis, la trichinose peut être due à T. pseudospiralis, T. nativa, T. nelsoni, et T. britovi dans différentes zones géographiques. On estime que 10 000 cas de trichinose surviennent chaque année dans le monde. Moins de 20 cas sont signalés chaque année aux États-Unis.
Physiopathologie de la trichinose
Le cycle de vie de Trichinella est entretenu chez les animaux qui sont nourris (p. ex., porcs, chevaux) ou qui mangent (p. ex., ours, renards, sangliers), d'autres animaux ayant des muscles striés contiennent des larves enkystées infectieuses (p. ex., les rongeurs). Les humains s'infectent en mangeant de la viande crue, peu cuite ou peu préparée à partir d'animaux infectés, le plus souvent porc, sanglier, ours sauvage. Les larves sortent des kystes dans l'intestin grêle, pénètrent dans la muqueuse et deviennent adultes en 6 à 8 jours. Les femmes font environ 2,2 mm de long et les mâles font environ 1,2 mm de long.
Les femelles matures libèrent des larves vivantes pendant 4 à 6 semaines puis décèdent ou sont expulsées. Les larves à peine nées migrent dans la voie sanguine et les lymphatiques, mais ne survivent finalement que dans les cellules des muscles striés squelettiques. Les larves s'enkystent complètement en 1 à 2 mois et restent vivantes pendant plusieurs années comme parasites intracellulaires. Les larves mortes finissent par être résorbées ou calcifiées. Le cycle ne continue que si les larves enkystées sont ingérées par un autre carnivore.
Image from the Centers for Disease Control and Prevention, Global Health, Division of Parasitic Diseases and Malaria.
Symptomatologie de la trichinose
De nombreuses infections à Trichinella sont asymptomatiques ou légères.
Au cours de la 1ère semaine, des nausées, des crampes abdominales et de la diarrhée peuvent survenir.
Une à 2 semaines après le début de l'infection, de la symptomatologie systémique apparaissent: œdème facial ou périorbitaire, myalgies, fièvre persistante, céphalées, hémorragies sous-conjonctivales, pétéchies. La douleur oculaire et la photophobie précèdent souvent les myalgies.
Les symptômes dus à l'envahissement musculaire peuvent ressembler aux symptômes de la polymyosite. Les muscles intervenant dans la respiration, la parole, la mastication et la déglutition peuvent être douloureux. Dans les infections massives, une dyspnée grave peut survenir.
La fièvre est généralement rémittente, montant à 39° C ou au-delà, restant élevée pendant plusieurs jours, puis baissant progressivement. L'éosinophilie débute habituellement quand les larves nouveau-nées envahissent les tissus, atteignant leur maximum 2 à 4 semaines après le début de l'infection et se réduisant progressivement quand les larves s'enkystent.
Dans les infections graves, l'inflammation peut être la cause de complications: cardiaques (myocardite, insuffisance cardiaque, trouble du rythme), neurologiques (encéphalite, méningite, troubles visuels ou auditifs, convulsions) ou pulmonaires (pneumonie, pleurésie). Le décès peut être dû à une myocardite ou une encéphalite.
Les symptômes s'atténuent progressivement et la plupart disparaissent aux environs du 3e mois, quand les larves se sont complètement enkystées dans les cellules musculaires et ont été éliminées d'autres organes et tissus. Des myalgies vagues et une asthénie peuvent persister pendant des mois.
Des infections récidivantes à T. nativa dans les latitudes nordiques peuvent provoquer une diarrhée chronique.
Diagnostic de trichinose
Test dosage immunoenzymatique
Rarement biopsie musculaire
Aucun examen spécifique n'est disponible pour diagnostiquer la phase intestinale de Trichinella. Après la 2e semaine d'infection, une biopsie musculaire peut mettre en évidence les larves et les kystes, mais est rarement nécessaire. L'inflammation diffuse des tissus musculaires indique une infection récente.
Un grand nombre de tests sérologiques ont été utilisés mais le test immunoenzymatique qui a recours aux antigènes de T. spiralis excrétoires-sécrétoires semble être le moyen le plus rapide pour détecter l'infection, il est utilisé aux États-Unis. Les anticorps sont rarement décelables durant 2 à 8 semaines après le début de l'infection, de telle sorte que les tests doivent être répétés à des intervalles hebdomadaires, si les résultats sont initialement négatifs. Ces anticorps pouvant rester positifs pendant des années, la valeur de ces tests sérologiques est d'autant plus grande s'ils sont initialement négatifs puis se positivent. La sérologie et la biopsie musculaire sont des examens complémentaires: chacun pouvant être négatif en cas de trichinose. Le test cutané avec des antigènes larvaires n'est pas fiable.
Les enzymes musculaires (créatine kinase et LDH [lactate déshydrogénase]) sont élevées chez 50% des patients et sont corrélées à des électromyogrammes anormaux.
Une éosinophilie est fréquente mais a de nombreuses causes infectieuses et non infectieuses (voir tableau Troubles et traitements importants associés à l'éosinophilie).
La trichinose doit être distinguée des troubles suivants
Rhumatisme articulaire aigu,arthrite aiguë, angio-œdème/œdème de Quincke et myosite
Maladies fébriles telles que la tuberculose, la fièvre typhoïde, le sepsis et la brucellose
Manifestations neurologiques d'une méningite, encéphalite et poliomyélite
Éosinophilie due à des néoplasies, leucémie éosinophile, polyartérite noueuse ou maladie provoquée par d'autres nématodes migrateurs
Traitement de la trichinose
Le traitement repose sur l'albendazole ou le mébendazole pour éliminer les vers adultes
Traitement symptomatique
Les anthelminthiques permettent d'éliminer les vers Trichinella adultes du tractus gastro-intestinal, mais une fois que les larves se sont enkystées dans le muscle squelettique, le traitement peut ne pas les éradiquer ou éliminer les symptômes associés.
L'albendazole 400 mg par voie orale 2 fois/jour pendant 8 à 14 jours ou le mébendazole 200 à 400 mg par voie orale 3 fois/jour pendant 3 jours, suivi par 400 à 500 mg 3 fois/jour pendant 10 jours peuvent être utilisés. L'efficacité de doses plus élevées et prolongées pour tuer les larves enkystées est incertaine et les effets indésirables sont plus probables.
Les antalgiques permettent de soulager des douleurs musculaires. Pour les manifestations allergiques sévères ou en cas d'atteinte myocardique ou du système nerveux central, de la prednisone 20 à 60 mg par voie orale 1 fois/jour est administrée pendant 3 ou 4 jours puis diminuée en 10 à 14 jours.
Prévention de la trichinose
La trichinose peut être prévenue en cuisant la viande de porc ou la viande d'animaux sauvages jusqu'à ce qu'elle soit brune (> 71° C en profondeur). Les larves peuvent être tuées dans de la viande de porc de < 16 cm d'épaisseur en congelant le porc à -15° C pendant 20 jours. La congélation n'est pas recommandée pour la viande d'animaux sauvages car ils peuvent être infectés par Trichinella spp qui résiste aux basses températures.
La viande fumée ou salée, la cuisson au micro-onde ne tuent pas les larves de manière fiable.
Les hachoirs à viande et autres articles utilisés pour préparer la viande crue doivent être soigneusement nettoyés. Se laver les mains avec du savon et de l'eau est également important.
Les porcs d'élevage ne doivent pas être nourris avec des viandes crues.
Points clés
Les humains sont infectés par Trichinella en mangeant de la viande crue, peu cuite ou préparée à partir d'animaux infectés, le plus souvent porc, sanglier ou ours.
Les larves se désenkystent dans l'intestin grêle, pénètrent la muqueuse et deviennent des adultes qui libèrent des larves vivantes; les larves migrent par la circulation sanguine et les lymphatiques et s'enkystent dans les cellules musculaires squelettiques striées.
Les symptômes commencent par une irritation gastro-intestinale suivie par un œdème périorbitaire, des douleurs musculaires, une fièvre et l'éosinophilie.
Les manifestations s'atténuent progressivement au 3e mois environ, quand les larves se sont complètement enkystées bien que des douleurs musculaires et une fatigue relatives puissent persister.
Diagnostiquer par test immunoenzymatique.
Traiter les symptômes (p. ex., par des analgésiques et de la prednisone pour les manifestations allergiques ou pour l'atteinte du système nerveux central); les anthelminthiques tuent les vers adultes, mais une fois que les larves s'enkystent dans le muscle squelettique, le traitement peut ne pas les éradiquer ou éliminer les symptômes associés.
La cuisson complète de la viande de porc et d'animaux sauvages peut prévenir la trichinose.